Pour certaines entreprises, l’organisation apprenante est un eldorado peu réaliste. Pour d’autres, c’est une nécessité.

Jusque-là, tout va bien
C’est l’histoire d’une entreprise. Pas de celles qui périclitent, ni même de celles qui ronronnent, non, une entreprise qui va bien, dont le chiffre d’affaires et le résultat dessinent de belles courbes année après année. Oh ! Le secteur, l’industrie, n’est pas de ceux qui sont promis au plus brillant avenir par chez nous mais il offre un mix intéressant de commandes privées et de marchés publics si bien que les salariés gardent confiance.
Et puis un jour, dans le bureau d’un directeur RH, la réalité s’invite brutalement : il y a danger. Les experts de l’entreprise, ces collaborateurs aux compétences uniques que la concurrence jalouse et qui font l’orgueil des départements R&D et production, vont partir. Non pas parce qu’ils ne s’y sentent plus aussi bien ; non pas parce que les orientations stratégiques leur déplaisent ; simplement parce qu’ils… vieillissent.

Un contingent en augmentation
Le sort de cette entreprise est-il si particulier ? Sans doute pas. Aujourd’hui, les seniors (on serait senior à partir de 55 ans, nous disent les études) (tant pis si nous connaissons tous des quinquas qui sont dans leur tête bien plus jeune que des trentenaires) constitueraient selon l’Insee 16,8 % de la population active et cette proportion continue d’augmenter.
On est ici en présence d’une frange de collaborateurs à la fois très expérimentés et moins enclins que d’autres à aller voir si l’herbe est plus verte ailleurs. Si on élargit un peu le spectre et que l’on regarde les 50 ans et plus, ils représenteraient 15 % du total des mouvements de main d’œuvre et 28 % des emplois (chiffres 2014).

Environ 80 % des postes à pourvoir
Mais ce n’est pas parce qu’ils sont plus fidèles qu’il ne faut rien faire. Car un autre écueil surgit : selon France Stratégie, quatre postes à pourvoir sur cinq depuis 2012 et jusqu’en 2022 viendraient des départs en fin de carrière.
Ce qui en fait, du monde. Et ce, sans compter les mouvements de main d’œuvre normaux, qui ne cessent d’augmenter alors que l’emploi, lui, croît difficilement (dans les établissements de dix salariés ou plus, le taux de rotation est passé de 36 % en 1999 à 59 % en 2014).

Retenir mais après ?
Des efforts ont été faits pour maintenir les seniors en emploi, ne serait-ce qu’en supprimant les dispositifs de pré-retraites ou en modifiant la base de calcul des retraites. Ils ont visiblement porté leurs fruits puisque leur taux d’activité est passé de 67 % en 1990 à 71,5 % en 2015 et que l’âge du départ en retraite a progressivement reculé (un peu moins de 61 ans en moyenne aujourd’hui).
Cela dit, une fois que vos collaborateurs ont été convaincus de ne pas partir tout de suite, pouvez-vous vous estimer soulagé(e) ? Sans doute pas, car c’est maintenant que votre travail commence. Préparer leur départ, ce n’est pas juste prévoir le buffet et penser au discours-qui-fera-son-petit-effet. C’est avant tout anticiper la perte de savoirs et de savoir-faire.

Orchestrer la transmission
Pour un certain nombre de secteurs tels que celui évoqué en introduction ou tel que la fonction publique (41 % des cadres y ont 50 ans ou plus), il y a urgence à favoriser le transfert de compétences entre les détenteurs du savoir-faire clef de l’organisation et leurs collègues qui vont prendre la relève.
La chose ne s’improvise pas : tutorat ou mentorat, cercle d’échanges ou world café, communautés de pratiques ou co-développement, AFEST… les pratiques sont nombreuses et c’est la qualité du mix qui leur donnera toute leur saveur et évitera l’amnésie organisationnelle. Jusqu’à la mise en place d’une solution de cartographie des compétences afin de suivre comment chacun s’empare de cette richesse pour son propre intérêt et celui de l’organisation.

Vers l’organisation apprenante
Aussi bénéfiques soient-elles par elles-mêmes, ces pratiques doivent aussi être connectées avec la raison d’être de l’entreprise, de l’établissement ou de l’équipe – et, cela va sans dire, soutenues voire appliquées par les dirigeants.
Elles doivent véhiculer de la remise en question et, pour cela, se raccrocher à la vision et à la culture en vigueur au sein du collectif. Elles doivent, au fond, s’articuler avec une approche plus globale, celle d’une organisation apprenante.
Permettre aux seniors de transmettre tout ce que l’expérience leur a apporté, c’est leur offrir la concrétisation rêvée de leur carrière. Et ces années où ils accompagneront leurs pairs dans leur progression compteront pour certains parmi leurs plus belles années – on reçoit tellement lorsque l’on donne.

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