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Auteur/autrice : Laurent Habart

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Les mécanismes de l’apprentissage

C’est une lapalissade trop souvent oubliée : seul l’apprenant apprend. Trop souvent oubliée car, au moment de réfléchir à un projet e-learning, lorsqu’on se pose pour bâtir le parcours pédagogique de l’apprenant, qui se demande encore comment celui-ci apprend ?
Les cogniticiens ont identifié quatre grands piliers de l’apprentissage. À la suite de leurs travaux, je vous propose quelques enseignements et pistes à explorer pour vos modules e-learning.

Prenez vos apprenants par la main

Pour les cogniticiens, l’attention est le premier pilier de l’apprentissage. Derrière elle se cache le mécanisme qui nous permet d’identifier l’information pertinente et de décider de son traitement. Elle se décompose en trois temps :
–    Premier temps : un système d’alerte. Notre attention nous dit : « Voilà quelque chose qui pourrait m’intéresser ». Les modules qui commencent par énoncer un paradoxe ou par raconter une histoire, qui bousculent donc nos acquis ou font appel à nos émotions, sont de nature à déclencher ce système d’alerte chez l’apprenant ;
–    Deuxième temps : un système d’orientation. Notre attention nous fait tourner le regard vers ce qui l’a éveillé et nous incite à nous mobiliser ;
–    Troisième temps : le contrôle exécutif. C’est lui qui nous permet de nous focaliser sur l’important et de chasser d’éventuels « bruits » qui viendraient perturber notre compréhension. Pour y parvenir, notre cerveau a besoin d’être guidé. Un peu comme si vous étiez au milieu d’une jungle : à suivre un sentier sans savoir où il mène, vous pourriez vite être tenté de chercher un raccourci et dévier ; avec une carte en main et la destination clairement indiquée, vous ne penserez pas à emprunter un chemin de traverse.

Testez vos apprenants en permanence

L’accent mis sur les interactivités dans les formations distancielles montre combien on a pris conscience qu’il faut agir pour apprendre. Comme le disent dans leur langage les cogniticiens, « l’exposition passive a un stimuli conduit à peu d’apprentissage » (Stanislas Dehaene). L’engagement actif est donc le second pilier de l’apprentissage.
Plus l’apprenant se met en jeu et teste son savoir, mieux il apprend. Une étude réalisée par le professeur Roedinger (université de Washington, Saint Louis) a montré que la rétention d’information était même proportionnelle au nombre de tests passés. On retient presque deux fois mieux lorsque chaque séquence d’apports est suivie d’une séquence de tests que lorsqu’on se contente de séances d’études.

Acceptez qu’ils se trompent

Mécanisme de l'apprentissageComment fonctionne notre cerveau en phase d’apprentissage ? Selon les cogniticiens, il suit un modèle prédictif. Il émet des hypothèses qu’il teste sur la réalité. Le retour d’information qu’il reçoit de son test constitue donc le troisième pilier de l’apprentissage. Il permet de valider ou modifier l’hypothèse formulée par le cerveau et donc de créer du savoir. Mais l’apprentissage ne se déclenche vraiment que si l’hypothèse s’avère fausse. On ne peut pas apprendre sans erreur.
Les quiz simplistes dont se parent de nombreux modules, sous couvert de favoriser l’activité des apprenants, peuvent donc se révéler contre-productifs. C’est en découvrant qu’il se trompe que l’apprenant va prendre conscience du savoir, savoir-faire ou savoir-être qu’il ne maîtrise pas – « Le rôle du concepteur est de créer de l’inattendu » disait le designer Kenneth Grange.
Attention cependant à l’effet néfaste de l’erreur chez les moins persévérants. Montrer les bénéfices de l’apprentissage et garantir la progression de l’apprenant restent des corollaires essentiels.

Faites-les dormir

Le dernier pilier de l’apprentissage révélé par les cogniticiens concerne la consolidation. Autrement dit cette étape qui fait passer l’information de notre cortex pré-frontal, siège de l’activité consciente et réflexive, à des réseaux neuronaux moins conscients. Comme le faisait déjà remarquer le psychologue Jean Piaget au début du siècle dernier, le savoir a besoin de s’assimiler et cette assimilation ne va pas de soi. Elle prend du temps. Pourquoi ? Entre autres parce que c’est durant la nuit qu’elle se réalise. En phase de sommeil, notre cerveau rejoue ce qu’il a vécu durant la journée et permet ainsi au savoir de mieux s’ancrer. Distribuez les temps d’apprentissage en plusieurs séquences dissociables voire sur plusieurs jours sera alors gage de meilleure réussite.

Dix conseils pour choisir un prestataire vidéo

Vous pilotez un projet pour lequel votre client, ambitieux, souhaite de la vidéo. Bien. Vous vous réjouissez à l’avance… jusqu’au moment où il vous faut choisir votre prestataire. Et là, vous vous demandez, soudain inquiet : quelles informations lui donner pour qu’il établisse un devis aussi proche que possible de la réalité ? Sur quels critères le choisir ? Voici dix conseils pour vous guider.

1.    Définissez le nombre de séquences que vous allez devoir tourner. Qu’est-ce qu’une séquence ? C’est l’unité de base sur un tournage. Elle est composée d’un script, un décor et un groupe de comédiens. Notez bien qu’un même script peut se composer de plusieurs séquences (par exemple une première séquence dans un salon puis une seconde dans une cuisine).

2.    Définissez le nombre de décors différents (bureau professionnel, salle de réunion, entrepôt, intérieur privé…). Plus il y a de décors, plus ils sont variés, plus il y a de préparation en amont du tournage.

3.    Estimez le nombre de comédiens présents sur le tournage chaque jour : l’équipe de tournage réalisera un plan de travail de façon à optimiser leur présence… car un comédien qui ne tourne qu’une séquence dans la journée est en général payé pour la journée.

4.    Evaluez la durée quotidienne effective de tournage afin d’avoir une idée de la durée totale. Il est courant de tourner entre six et dix minutes de vidéo par jour, ou encore de cinq à dix séquences. Mais si vos séquences durent trente secondes, vous n’en tournerez pas pour autant vingt dans une journée !

5.    Précisez le type de séquence que vous envisagez : un chef opérateur n’utilisera pas le même matériel pour des prises statiques où vos comédiens sont assis derrière un bureau que pour des prises où ils sont en mouvement… et le budget matériel n’est pas à négliger !

6.    Interrogez le prestataire sur les conditions de tournage des vidéos qu’il vous montre en guise d’exemples : elles ont souvent été tournées avec un budget ou des délais qui ne sont pas les vôtres ! Une vidéo d’une minute trente qui a nécessité une journée de tournage sera certainement de meilleure facture que vos propres vidéos tournées en trois fois moins de temps.

7.    Ne vous arrêtez pas à la réalisation, penchez-vous sur le montage. Le réalisateur montera-t-il lui-même les vidéos qu’il aura tournées ? Fera-t-il appel à un monteur que vous devrez également briefer ?

8.    Evaluez le degré d’écoute de votre prestataire. Cherche-t-il vraiment à cerner votre projet ? Vous offre-t-il une dimension de conseil, sachant que vous n’êtes pas spécialiste ? Mieux vaut que toutes les questions, même les plus « évidentes » en apparence, soient posées avant que vous ne receviez son premier devis.

9.    Optimisez votre budget. Déterminez ce que vous prenez à votre charge et ce que vous laissez à votre prestataire. Souhaitez-vous fournir les décors vous-mêmes ? Vos vidéos peuvent-elles se tourner chez votre client, dans votre entreprise ou faut-il louer des locaux (qui vous reviendront sans doute moins cher qu’un vrai studio de cinéma) ?

Voilà qui fait neuf. Et le dixième, me direz-vous ? Le dixième conseil paraît superflu tant qu’on n’a pas été confronté à la situation… et essentiel dès qu’on a dû y faire face : mieux vaut un prestataire « classique » mais très collaboratif qu’un prestataire très doué mais « caractériel ».
Le budget d’un tournage dépend grandement du nombre de jours de présence des comédiens et des techniciens sur le plateau – tout dépassement ayant un coup que vous devrez assumer. Il n’est donc jamais totalement inutile d’opter pour un prestataire qui suive vos directives et sache intégrer vos contraintes.

Dix conseils pour écrire un scénario de vidéo apprenante

Ils sont légion, les clients qui rêvent d’inclure des vidéos dans leurs modules. Et qui rêvent que les scénarios que vous allez leur écrire donnent des vidéos aux allures cinématographiques. Gageure ? Oui, sans doute. Rien ne vous empêche cependant de leur donner ce petit supplément d’âme qui permettra à l’apprenant de mieux entendre vos messages. Voici donc dix conseils pour améliorer l’écriture des scénarios de vos vidéos.

1.    Racontez une histoire. Gardez en tête que l’apprenant, comme n’importe quel spectateur, est passif devant une vidéo. Il faut donc trouver le meilleur moyen de provoquer chez lui un minimum d’investissement. Et pour cela, rien de mieux qu’une histoire, même brève, même simple.

2.    Déterminez un personnage principal à votre scénario : leprotagoniste. Dans la plupart des cas, il s’agira du rôle personnifiant l’apprenant.

3.    Donnez un objectif à votre protagoniste, et faites-en sorte qu’il l’exprime clairement de façon à ce que l’apprenant le comprenne.

4.    Dressez des obstacles sur la route de votre protagoniste vers son objectif. Un exemple ? Un manager doit améliorer la cohésion de son équipe… mais deux collaborateurs sont en conflit : comment va-t-il surmonter cet obstacle pour atteindre son objectif ?

5.    Suscitez des conflits. Ils sont à la base de l’intérêt que nous trouvons aux histoires. Pour cela, faites en sorte que vos obstacles soient de vrais obstacles (et non de petites péripéties) et vos objectifs, de vrais objectifs (avec un véritable enjeu).

6.    Commencez vos scènes après le début et finissez-les avant la fin. Autrement dit, zappez les « Bonjour, je m’appelle… » et les « au revoir et à bientôt ». Plus vite vous rentrerez dans le vif du sujet, plus vite vous capterez l’attention de l’apprenant.

7.    Faites agir vos personnages. La plupart des scènes de dialogues présente deux personnages discutant face à face. En les plaçant dans leur contexte quotidien, en doublant les dialogues de gestes signifiants, vous augmentez l’impact de votre message.

8.    Favorisez les dialogues courts, les échanges brefs, les réponses du tac au tac, les discussions à bâtons rompus… Pourquoi filmer un monologue quand il est si simple de le résumer en quelques points sur un écran ?

9.    Diversifiez la mise en forme des informations que vous devez faire passer : flash back, flash forward, split screen sont autant de techniques qui permettent de donner du relief à vos scénarios.

10.    Assistez aux tournages de vos vidéos. Vous verrez les comédiens mettre en scène vos textes, vous les entendrez prononcer vos dialogues et vous prendrez instantanément conscience de ce qui fonctionne… et de ce qui fonctionne moins !

Ces indications, et bien autres, font la richesse des principaux manuels de dramaturgie tels que La dramaturgie, Yves Lavandier (édition Le clown et l’enfant), Story, Robert McKee (ReganBooks) ou encore The anatomy of story, John Truby (Faber & Faber).

Dix conseils pour écrire un texte en voix-off

À moins que vous ne soyez scénariste de film, auteur de théâtre ou conteur, écrire pour être lu à voix haute n’est pas pour vous une pratique courante. Il est donc utile d’avoir en tête quelques règles de base pour adapter le script de votre module e-learning à la lecture d’un comédien.

En voici dix :

  1. Veillez à employer un style oral. Pour cela, faites des phrases courtes et simples : elles sont plus facilement compréhensibles. Mieux vaut donc deux phrases brèves qu’une seule phrase longue pour exprimer la même idée.
  2. Soignez les transitions entre les phrases : votre texte doit « couler » avec fluidité. Optez pour un texte linéaire plutôt qu’un texte procédant à de fréquents retours en arrière.
  3. Impliquez l’apprenant pour maintenir son attention au plus haut. Les questions rhétoriquesdont vous allez vous-même donner la réponse ou les interpellations remplissent efficacement cette fonction. Des incises telles que « pour vous » ou « comme vous le savez » jouent également ce rôle.
  4. Reformulez votre propos afin qu’il soit parfaitement compris. Des adverbes tels que « c’est-à-dire », des expressions telles qu’« autrement dit » peuvent introduire naturellement cesreformulations.
  5. Préférez les verbes, et notamment les verbes d’action, aux substantifs correspondants. Mieux vaut écrire « Changer les habitudes entraîne… » que « Le changement des habitudes entraîne… ».
  6. Mettez les verbes au présent : le passé ou le futur créent une distance avec le récepteur du message peu propice à renforcer son attention et donc son implication.
  7. Utilisez des tournures de phrases positives : elles donnent plus de poids à votre message.
  8. Évitez les propositions relatives : elles ont tendance à faire perdre le fil directeur de la phrase principale. Si ce n’est pas possible, faites en sorte qu’elles soient courtes.
  9. Évitez le participe présent : l’impression de simultanéité qu’il véhicule la plupart du temps passe moins facilement par la voix que par l’écrit.
  10. Évitez les hiatus (succession de deux voyelles) et certaines associations de phonèmes, type /s/ et /ch/(souvenez-vous des fameuses « chaussettes de l’archiduchesse »).

Dernier conseil pour terminer cette liste, et non des moindres : relisez-vous à voix haute. Vous sentirez, à l’oreille, les phrases qui accrochent et celles qui glissent avec bonheur. Flaubert avait son gueuloir et, diable, qu’il était efficace !

(Cet article a été rédigé avec le concours de Guillaume Lemonnier, responsable de programmes chez CrossKnowledge)

Comment gérer la voix off au stade de la conception

La présence ou non de voix off infléchit radicalement la rédaction du script d’un module e-learning. Passons en revue les trois modalités d’intégration de voix off que l’on peut rencontrer. 

La voix off et le texte à l’écran sont identiques

Formule souvent adoptée pour des motifs d’accessibilité, elle impose une redondance entre le texte et la voix. Ce redoublement offre plusieurs inconvénients, citons-en trois :

  • le procédé diminue l’immersion de l’apprenant qui se laisse davantage guider
  • si la voix « lit » moins vite ou plus vite que l’apprenant, il subit un déficit d’attention
  • l’impact respectif du texte du son diminue puisqu’ils ont besoin de s’appuyer l’un sur l’autre.

Les études cognitives du Pr Richard Mayer (université de Santa Barbara en Californie) ont ainsi montré une moins grande efficacité de cette technique.

Pour éviter de « sacrifier » la pédagogie sur l’autel de l’accessibilité, d’autres mécanismes existent, tels que les sous-titres. Correctement placés et activables à l’envi, ils peuvent efficacement répondre aux exigences d’accessibilité sans imposer ce redoublement à tous les apprenants.

La voix off est réservée à un type de contenu

Pour éviter l’écueil de la redondance, certains modules limitent la voix off à un type de contenu particulier, messages clefs du module ou consignes de navigation. La voix intervient donc en soutien du visuel et plusieurs difficultés surgissent alors :

  • harmoniser et synchroniser voix et texte à l’écran
  • conserver sa fluidité à l’ensemble du module
  • éviter de perturber la concentration de l’apprenant.

Le problème majeur de cette technique réside dans notre capacité de réception : l’apprenant réagit mieux lorsque le visuel (texte et/ou image) est au service de la voix que lorsque la voix est au service du visuel.

La voix off interagit avec le texte et l’image

Le module devient « raconté » par la voix et son propos, lorsque nécessaire, est soutenu par du texte ou illustré par des images. Ce procédé impose quelques contraintes au concepteur :

  • rédiger le texte du module de façon à ce qu’il soit lu par un comédien (plutôt que par une voix de synthèse : voir  article de B.Lhuillier à ce sujet)
  • rédiger le texte de façon à ce que les mots clefs puissent en être aisément extraits et animés à l’écran
  • envisager les interactions entre le texte et le contenu à l’écran dès la phase de rédaction.

Au final cependant, c’est cette formule qui permet de tirer le meilleur à la fois de la voix et du visuel (texte ou image) en offrant le plus d’impact aux messages que vous voulez faire passer.

La place de l’apprenant dans la conception d’un module e-learning 2

Deuxième partie de l’article signé Laurent Habart du 21 février dernier.

Où vous allez découvrir un exemple concret d’adaptation d’un module aux niveaux variés des apprenants…

Le cas du CFPB

Puisque la première partie de ce sujet prenait ses racines dans la Bourse, allons chercher du côté du monde bancaire un exemple pour illustrer notre propos.
Le CFPB (Centre de formation de la Profession Bancaire) a mis au point un parcours de formation sur la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme : la LAB-FT. L’objectif recherché ? Il est triple. Il vise à développer la capacité de l’apprenant à :
–    assurer une vigilance constante sur les mouvements de capitaux
–    détecter les opérations atypiques
–    conduire les diligences nécessaires.
Le module, qui se présente sous forme de serious games, est inspiré de faits réels. L’apprenant est immergé dans un monde professionnel proche du sien. Proche du sien, vraiment ? Voilà toute la question. Comment conjuguer, au sein d’un même programme, des niveaux de connaissance des mécanismes de lutte contre le blanchiment très différents selon les apprenants ?

Trois modules en un

Le CFPB a résolu cette question en concevant, pour les mêmes objectifs, non pas un mais trois modules. Trois modules avec trois approches pédagogiques différentes :
–    pour un apprenant débutant, le mode guidé, où l’expert présente la situation et le processus à suivre et amène l’apprenant à comprendre ce qu’on attend de lui pour résoudre la situation
–    pour un apprenant doté d’un niveau de connaissance « moyen », le mode accompagné, où l’expert accompagne et conseille l’apprenant en cas d’erreur afin de l’aider à trouver par lui-même la solution
–    pour un apprenant déjà bien avancé, le mode libre, où il peut chercher seul la solution aux problèmes qu’on lui présente.
Du point de vue du concepteur pédagogique, cette approche permet de prendre en compte la majorité des situations. Du point de vue de l’apprenant, elle lui permet de réaliser le module en toute autonomie, quel que soit son niveau.
Évidemment, qui dit triple approche dit budget réévalué… mais est-ce que l’atteinte des objectifs et la réussite de la formation ne le valent pas ?

(Si vous souhaitez en savoir plus sur ce programme, vous pouvez contacter Sylvie Soriano au CFPB.)

La place de l’apprenant dans la conception d’un module e-learning 1

Où vous allez découvrir comment la Bourse nous en apprend sur le travail de concepteur pédagogique

Le concours de beauté

L’économiste John Maynard Keynes (1883-1946) avait l’habitude de raconter une histoire pour faire comprendre un des mécanismes pivots de la Bourse : le concours de beauté.

Imaginez : connu pour la sagacité de votre jugement et l’élégance de vos goûts, vous avez été convié à participer au jury d’un concours afin d’élire le plus beau visage parmi vingt candidates toutes plus éblouissantes les unes que les autres.
Oui mais voilà, à votre grand étonnement, on ne vous demande pas de juger de la beauté de leur visage selon votre goût personnel. Non, on vous demande de choisir le visage qui recevra le plus de suffrages parmi tous les votants du jury.
C’est un exercice auquel rien ne vous a habitué jusque là : il va s’agir pour vous d’anticiper le goût majoritaire.

Intégrer la logique de l’apprenant

Selon Keynes, c’est exactement ainsi que fonctionne la Bourse et ainsi que travaillent les courtiers. Celui qui fait mieux fructifier son portefeuille de titres que son concurrent n’est pas nécessairement celui qui a les titres les plus sûrs. C’est plus certainement celui qui acquiert les titres vers lesquels tout le monde va se ruer sous peu. Celui qui devine ce que seront les besoins à venir du plus grand nombre.

Cette attitude, c’est aussi celle que vous devez avoir au moment de concevoir le synopsis d’un module de formation. Pour qu’il touche le plus grand nombre d’apprenants, pour qu’il réponde au mieux à leurs interrogations et à leurs besoins, il ne faut pas s’arrêter aux questions que vous vous poseriez à leur place. Il faut plutôt faire tout votre possible pour intégrer leur propre logique. Cela demande d’avoir une connaissance fine de trois facteurs :
–    leur niveau de connaissances
–    leurs méthodes de travail
–    leurs modes de pensée
Connaissant ces trois variables, vous serez mieux à même de percevoir les problématiques des apprenants et d’y répondre. Et pour acquérir cette connaissance, rien ne vaut l’échange avec quelques-uns d’entre eux !

Pour découvrir comment mettre cet enseignement en pratique, rendez-vous le mois prochain avec la seconde partie de cet article…

Les particularités de la lecture sur écran

Les études fondées sur l’oculométrie (ou eye-tracking) nous en apprennent beaucoup sur les différences entre lecture écran et lecture papier.

Les stratégies de l’œil

En effet, l’œil met en place des stratégies pour lire un texte que l’écran malmène plus ou moins. D’une part, selon le lecteur, l’œil se pose sur plus ou moins de mots dans un même texte ; il peut également avoir tendance à lire le haut des lettres ou encore à saisir un mot dans sa globalité indépendamment de l’ordre des lettres à l’intérieur dudit mot.

D’autre part, quel que soit le lecteur cette fois, l’œil ne peut fixer en règle générale que quatre lettres à la fois (cela explique que la simplicité du vocabulaire influe sur l’intelligibilité d’un texte). En revanche, son champ visuel s’élargit d’une zone attentionnelle, dénommée « empan visuel« , en amont mais surtout en aval du mot fixé, qui permet d’anticiper sur ce qui va être lu par la suite.

Les contraintes du net

Par ailleurs, l’aspect visuel de l’écran (luminosité, contraste, scintillement) entraîne une perturbation oculaire et donc une dégradation de la prise d’information. L’œil n’atteint pas le centre du mot lorsqu’il le fixe, à l’instar d’une lecture sur papier, si bien qu’il doit se fixer non pas une mais deux fois. Cette multiplication des fixations visuelles le fatigue naturellement.

Le système du scrolling, quant à lui, minimisant la mémorisation spatiale, rend plus difficile la rétention d’information et diminue donc l’efficacité de la lecture. Enfin, les liens hypertextes, ajoutant de la profondeur à un texte, ont tendance à provoquer une désorientation cognitive pour le lecteur qui s’y plonge.
Ces études avancent ainsi l’idée que, compte tenu des techniques aujourd’hui à disposition, la lecture sur écran semble davantage réservée à la recherche d’informations qu’à la lecture prolongée.

(Pour plus d’informations, lire notamment l’ouvrage de Thierry Baccino,  La lecture électronique, aux Presses universitaires de Grenoble)

Mixer formation et dramaturgie : le Graal de tout concepteur pédagogique (Part II)

Suite et fin de l’article de Laurent Habart : Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur votre concepteur pédagogique sans jamais oser lui demander. Aujourd’hui : « Pourquoi raconter une histoire dans vos modules de formation » ?

Pourquoi une histoire ?

Vous avez donc décidé de faire passer les informations essentielles de vos modules au moyen d’une histoire. Mais pourquoi utiliser une histoire ? Prenons un exemple : étant donné le turn-over élevé et la forte culture d’entreprise chez votre client, il vous a demandé de concevoir pour ses managers des modules de formation sur l’intégration des nouveaux collaborateurs.

Plusieurs solutions s’offrent à vous : Vous pouvez par exemple introduire votre parcours en passant en revue les grandes étapes d’une intégration : préparer l’environnement de travail du nouveau collaborateur, annoncer son arrivée en interne, prendre le temps de l’accueillir, etc.

Autre solution : vous pouvez faire en sorte que l’apprenant s’investisse dans le parcours en lui racontant une histoire, celle de Thierry. Thierry manage une équipe de six personnes très soudées. Ces six personnes voient d’un mauvais œil l’arrivée d’un nouvel élément car elles craignent qu’à terme, il prenne la place de l’une d’elles comme cela s’est déjà produit par le passé ; et ce, d’autant plus qu’il a un profil senior… Face à cette opposition, comment Thierry va-t-il réussir à intégrer le nouveau collaborateur ?

Dans la première approche, vous sollicitez exclusivement la capacité intellectuelle de l’apprenant ; vous lui demandez un effort de concentration, de conceptualisation et de projection.
Dans la seconde approche, vous sollicitez d’abord la capacité émotionnelle de l’apprenant ; il n’a plus d’effort de concentration ou de projection à faire car il s’identifie spontanément à Thierry et veut savoir comment il va s’en sortir.
L’attention est immédiatement captée et l’apprenant ne lâchera pas tant qu’il ne saura pas. Et en trois mots, voici pourquoi.

Le triangle de base

Les nombreux ouvrages sur la dramaturgie nous apprennent qu’au cœur de toute histoire, qu’elle soit romanesque, théâtrale, cinématographique ou à vocation pédagogique, se trouve un élément essentiel : le conflit.
Le conflit suscite de l’insatisfaction que nous cherchons instantanément à combler. Et du conflit, nous en rencontrons quotidiennement dans notre vie professionnelle quand nous avons à résoudre mille et un problèmes d’ordre technique, personnel ou encore organisationnel.

Comment donc inventer une histoire ? Ou, dit autrement, comment créer du conflit ? Vous avez pour cela besoin de trois éléments qui constituent le triangle de base de toute histoire :

  1. Un protagoniste. Dans notre exemple, Thierry, par rapport à qui l’apprenant se positionne. Il s’identifie à lui et apprend au travers de lui.
  2. Un objectif. Thierry a un but, réussir la bonne intégration de son nouveau collaborateur. L’apprenant le sait et s’attend à ce qu’il fasse tout pour l’atteindre.
  3. Des obstacles. Thierry va devoir affronter le rejet de son équipe. Par quels moyens va-t-il parvenir à surmonter leur opposition ? C’est ce que l’apprenant souhaite découvrir, ce qui va le motiver pour suivre le parcours.

La connaissance s’acquiert par l’expérience

Bien sûr, tous les sujets, tous les parcours, tous les dispositifs ne se prêtent pas à ce type d’approche. Mais si vous pensez que raconter une histoire est un bon moyen pour transmettre un message, que le sujet s’y prête et que vous sentez vos apprenants prêts à s’y projeter, conservez en tête ce triangle de base de la dramaturgie.

Et s’il est vrai, comme le disait Albert Einstein, que « la connaissance s’acquiert par l’expérience, tout le reste n’est que de l’information », alors l’histoire comme expérience d’autrui est un terrain idéal pour des concepteurs avides d’offrir des expériences formatrices à leurs apprenants.