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t@d, le portail du tutorat à distance fête ses 10 ans

En 2003, Jacques Rodet lançait la communauté t@d “tutorat à distance” avec comme objectif la mutualisation des pratiques sur le tutorat : une cinquantaine de personnes se retrouvait pour échanger et produire sur cette thématique.

Aujourd’hui le paysage du tutorat à distance s’est modifié (e-learning, socialLearning, Mooc…) et t@d a évolué.

De communauté, il est devenu un réseau auquel on accède par son portail et les nombreux espaces du web social où il est présent.

logotad10ans

Pour fêter les 10 ans, une série de 22 webinaires (conférences en ligne gratuites) regroupés en 5 thèmes aura lieu entre le 1er octobre et le 12 décembre 2013 de 19 à 20h (heure de Paris).

Cet événement ambitionne de répondre à des questionnements quotidiens d’acteurs de la formation en ligne :

Thème 1. Fonctions et compétences des tuteurs à distance
Thème 2. Espace-temps du tutorat à distance
Thème 3. Les différentes formes du tutorat à distance
Thème 4. L’organisation du tutorat à distance
Thème 5. Conditions de travail des tuteurs à distance

Vous pouvez consulter le programme et réserver vos places : Le site des 10 ans de t@d
https://sites.google.com/site/letutoratadistance/Home/10-ans-de-t-d/calendrier

Participation gratuite sur réservation (60 places disponibles par conférence)

Categories e-Tutorat

Synthèse d’un atelier sur le tutorat dans les MOOCs

Cet atelier a été tenu par vidéoconférence entre les bureaux de la TÉLUQ à Québec et à Montréal, le 14 août 2013. Autour de Jacques Rodet, consultant-formateur en FOAD et initiateur et animateur t@d le portail du tutorat à distance, l’atelier a réuni Sylvie Pelletier, tutrice à la TÉLUQ, ainsi que France Henri, Caroline Brassard et Pierre Gagné, tous trois professeurs à la TÉLUQ.

L’atelier a été l’occasion d’échanger à partir des expériences des participants pour émettre des préconisations en matière d’encadrement à l’intention des concepteurs de MOOCs. L’expérience des participants des MOOCs était très variée : expériences directe d’étudiant inscrit, visites et observations de MOOCs, échanges avec un proche inscrit à un MOOC.

Cette synthèse n’est pas tant un résumé des échanges qu’une tentative d’en organiser les éléments en intégrant ce qui a été exprimé formellement, ce qui a été effleuré ou ce qu’il est possible d’inférer des propos tenus. De plus, la discussion ayant été très libre, la synthèse ne correspond pas non plus au déroulement des échanges.

Nous avons organisés nos propos de la manière suivante : d’abord de cerner le phénomène des MOOCs, puis présenter les caractéristiques observées dans l’expérience des participants, enfin, regrouper ce qui a été dit concernant la manière de concevoir l’encadrement dans un MOOC. Évidemment, cette synthèse a pour limite l’étendue relative de l’expérience directe des MOOCS des participants présents.

1. Les MOOCS, un phénomène très diversifié

Dès le départ, un premier tour de table a permis de constater qu’il y a MOOC et MOOC. Ainsi, une participante avait participé à un MOOC d’inspiration connectiviste alors que d’autres avaient participé ou observé des xMOOCs dont certains n’étaient pas aussi « massifs » que l’expression le prétend. Au-delà de ces différences facilement observables, on découvre que les MOOCs procèdent d’intentions et d’objectifs institutionnels, de modèles pédagogiques et de modèles d’affaires variés.

Les intentions des établissements qui pratiquent l’enseignement par MOOC peuvent être d’acquérir plus de notoriété, d’élargir à terme leur base de fréquentation, d’innover en pédagogie et de remplir une partie de leur mission traditionnelle en donnant accès à un très large public aux savoirs dont elles sont dépositaires et créatrices[1].

Les modèles pédagogiques qui sous-tendent les MOOCs sont potentiellement aussi variés qu’ailleurs dans l’enseignement. Les approches socioconstructivistes ou connectivistes donnent lieu à des cMOOCs articulés autour des démarches très ouvertes, faisant une large place à la collaboration entre apprenants et campent l’encadrement comme un accompagnement qui vient en soutien aux initiatives diverses des individus et des équipes. Les xMOOCs font appel à des démarches pédagogiques plus traditionnelles qui font appel à la médiatisation des interventions d’enseignement et à des démarches individualisées[2]. Rien n’empêche d’imaginer des configurations différentes.

En ce qui a trait aux modèles d’affaires, on peut constater jusqu’à maintenant leur absence dans les initiatives des grandes institutions. Les MOOCs sont expérimentaux et les établissements semblent moins préoccupés de leur trouver un modèle viable de financement et d’en tirer des revenus que d’explorer leur potentiel de fréquentation, de notoriété, d’innovation pédagogique pour leurs programmes campus.

2. Caractéristiques des MOOCs dans l’expérience des participants

Les MOOCs observés possèdent trois caractéristiques communes : l’ampleur de leur fréquentation, leur traitement pédagogique plutôt rudimentaire, et leur dépendance par rapport à l’autonomie des étudiants.

Premièrement, considérant leur prétention d’élargir, voire de massifier, l’accès aux savoirs spécialisés, les MOOCs sont conçus pour servir de très grands nombres d’étudiants. Il y a là un changement d’échelle pour les établissements campus ou à distance où la fréquentation d’un cours n’atteint pas souvent le millier d’étudiants. Même quand ces objectifs de fréquentation ne se réalisent pas, le MOOC n’en demeure pas moins conçu et organisé en fonction de cette capacité d’accueil.

Deuxièmement, la pédagogie des MOOCs est souvent rudimentaire quand on la compare à celle qui a cours dans les établissements de formation à distance et dans plusieurs initiatives de e-learning. Le traitement médiatique est à l’avenant : par exemple, des séquences vidéo relativement statiques véhiculent le contenu (conférences de professeurs), des textes à télécharger, des tests en ligne avec ou sans autocorrection. Les technologies sociales y sont plus plus ou moins élaborées et y jouent un rôle plus ou moins intense selon les approches pédagogiques préconisées : alors qu’elles doivent soutenir des interactions fréquentes et complexes dans les démarches connectivistes des cMOOCs, elles ont un usage plus limité dans les démarches individualisées des xMOOCs. Les compétences des intervenants en encadrement ne sont pas toujours à la hauteur des attentes des apprenants. Cependant, même peu développé, le traitement pédagogique et médiatique peut constituer une innovation très positive pour un enseignant sur campus. Par contre, l’utilisation des MOOCs se pose différemment dans les établissements de formation à distance, où leur conception implique une réduction (downgrading) contrôlée d’un dispositif à l’origine plus élaboré.

Troisièmement, les MOOCs, peut-être à cause de leur forte fréquentation et de leur faible élaboration pédagogique, misent implicitement sur l’autonomie de l’étudiant. Les services d’encadrement y sont peu élaborés, soit concentrés sur le lancement d’une démarche essentiellement autodidacte (individuelle ou collaborative), soit centrés sur les fonctions socio-affectives de l’apprentissage (soutenir la motivation, créer un sentiment d’appartenance, etc.) et moins sur les fonctions cognitives (répondre aux questions de contenu, élaborer sur les points mal compris, etc.) qui exigent des interventions plus spécialisées.

3. Que peut-on préconiser en matière d’encadrement pour les moocs

Les trois caractéristiques décrites ont des conséquences sur la manière de concevoir l’encadrement dans les MOOCs.

À cause des fréquentations élevées visées, on peut penser qu’il est impossible d’offrir le niveau d’encadrement caractéristique des cours à distance et que l’encadrement dans un MOOC doit être planifié et organisé en fonction d’un ratio tuteur étudiant beaucoup plus élevé que celui qu’on rencontre habituellement en formation à distance. Même si les modèles d’affaires n’ont pas été encore formalisés, on peut prévoir que les établissements voudront profiter des économies d’échelle et garder sous contrôle la partie des coûts qui grandit avec le nombre d’étudiants, dont les coûts d’encadrement. Il serait donc approprié d’adopter une approche d’ingénierie du tutorat.

Ainsi, en tenant compte des potentiels et des contraintes issues du contexte institutionnel, pédagogique et économique particulier à chaque MOOC, il serait souhaitable de procéder à une analyse des besoins d’encadrement pour identifier les services et les tâches d’encadrement à offrir. À cet égard, des dispositifs de recherche sur le comportement des étudiants dans les MOOCs sont grandement souhaitables. En attendant, on peut réfléchir à différentes approches.

Une première approche amènerait à structurer les services d’encadrement selon le degré d’engagement de l’apprenant dans sa formation et selon son évaluation de ses propres besoins. Ainsi, on pourrait concevoir plusieurs niveaux de services que l’apprenant pourrait choisir au départ de la formation. Par exemple, un niveau de base assurant le dépannage technique et administratif, pour assurer l’accès à la formation, qui s’appliquerait à tous les apprenants. Puis, un niveau de soutien cognitif, composé d’interventions facilitant l’appropriation des contenus. Ensuite, un niveau de soutien socio-affectif visant le maintien de la motivation, ou dans les cas d’apprentissage en équipe, la régulation des échanges, l’appartenance au groupe, etc. Puis, un niveau de soutien cognitif augmenté, où l’apprenant pourrait obtenir une rétroaction sur les productions. Enfin, un niveau de soutien métacognitif, pour objectiver son expérience d’apprentissage et améliorer sa maîtrise du métier d’apprenant.

À chaque niveau, on doit se concentrer sur les services nécessaires, ceux dont l’absence fait courir le plus grand risque d’abandon et d’échec de la formation. Le leitmotiv dans ce cas pourrait être : pas d’abandon de la formation par défaut de dispense de services d’accompagnement.

À chaque niveau, les interventions nécessaires à la prestation des services, incluant l’évaluation des apprentissages, ont avantage à être déléguées. Ainsi chaque fois que cela est possible, on peut concevoir des documents, des outils, des interventions préenregistrées, confier certaines tâches aux pairs. Cela permettrait de réserver les interventions des tuteurs aux tâches d’encadrement les plus spécialisées. L’autonomie de l’étudiant doit également être considérée comme un actif sollicité et valorisé, ce qui implique que les attentes soient correctement ajustées dès le départ.

À tous les niveaux, on doit se rappeler qu’une offre d’encadrement constitue déjà un encadrement : la disponibilité du service offert contribue à entretenir chez l’apprenant le sentiment qu’il n’est pas tout seul dans cette aventure. Ce sentiment a des effets positifs sur l’apprentissage, même si le service réel n’est jamais sollicité. Par contre, la qualité du service, lorsque qu’il est requis, doit être à la hauteur des attentes.

En matière de financement, on peut penser à des niveaux de facturation associés aux niveaux de service sollicités. On peut également penser à des frais minimaux universels qui permettraient, en raison des économies d’échelle, de financer l’ensemble des services offerts.

Dans la perspective d’élargir l’accès au savoir, une autre approche serait de modulariser l’offre de formation en unités plus petites. Par exemple, un cours donné pourrait être fragmenté en trois unités. Une première propose un survol du contenu, avec des activités assez simples et des services minimaux d’encadrement : elle viserait la compréhension générale du phénomène et la capacité d’en parler dans des contextes peu spécialisés. Elle s’adresse donc à un grand public. Une deuxième et une troisième proposent un approfondissement des contenus et des compétences plus élaborées qui s’exprimeraient dans des activités plus complexes et exigeraient des interventions d’encadrement plus élaborées à l’intention de personnes qui ont des besoins plus poussés.

4. Aspects financiers relatifs à l’encadrement des apprenants des moocs

À l’égard des préconisations exprimées sur l’encadrement dans les MOOCs, le plus difficile serait sans doute de trouver du financement, tant pour la conception que pour l’offre de services d’encadrement. Il est admis que les MOOCs sont des formations gratuites et non diplômantes. Or, l’État accorde son financement aux universités sur la base du nombre d’étudiants inscrits à des formations diplômantes. Quelles universités peuvent s’offrir des MOOCs à leurs frais ?

Les grandes universités à charte peuvent sans doute sacrifier des revenus en échange d’une plus grande visibilité pour leurs programmes menant à des formations diplômantes. Voudraient-elles investir davantage pour offrir un meilleur encadrement aux étudiants qui fréquentent leurs MOOCs ? Autrement, est-il pensable que les étudiants inscrits à leurs MOOCs acceptent d’assumer une partie des coûts d’encadrement afin qu’on puisse les aider à réussir des cours qui ne mènent pas au diplôme ?

Nous avons évoqué l’idée d’ouvrir un passage du MOOC vers la formation diplômante pour l’apprenant qui souhaite se voir reconnaître des crédits universitaires. Le cas échéant, l’université pourrait toucher la subvention gouvernementale et les frais d’inscription de l’étudiant qui migre du MOOC vers le cours crédité. Cette éventuelle source de revenus pourrait inciter l’université à investir dans les MOOCs. Encore faudrait-il qu’elle cible des contenus de cours dont la popularité est démontrée afin de pouvoir amortir les coûts de développement de ses MOOCs dans un délai raisonnable.

Quant à l’idée d’offrir des MOOCs comportant des frais d’inscription, si minimes soient-ils, il est à craindre la résistance farouche de l’internaute qui croit fermement au principe selon lequel tout ce qui se trouve sur Internet se doit d’être gratuit (même en sachant que si c’est gratuit, c’est lui le produit!).

En dépit de ces désagréables considérations financières, le MOOC apparaît être une vitrine formidable pour promouvoir l’offre de cours d’une université. Le défi est d’autant plus facile à relever pour l’université qui dispose d’une solide expertise en FAD. Cela apparaît d’ailleurs un avantage concurrentiel dans le marché des MOOCs, car les autres acteurs sont bien souvent de grandes universités campus qui jouissent d’une solide notoriété, mais qui ne maîtrisent pas encore l’art d’enseigner à distance.

Si l’expérience des MOOCs s’avère profitable pour l’université, il est permis de croire qu’elle veuille bien débourser davantage pour offrir des services d’encadrement convenables aux milliers d’apprenants qu’elle a réussi à séduire.

Conclusion

Comme entreprise d’accessibilité du plus grand nombre aux savoirs spécialisés, les MOOCs méritent notre intérêt, mais à condition qu’ils se préoccupent non seulement du nombre d’entrants, mais également du nombre de sortants, i.e. des résultats d’apprentissage qu’ils prétendent atteindre. Dans ce contexte, le développement des MOOCs constituent une occasion de faire évoluer de manière importante les modèles de tutorat tels qu’ils ont été développés pour les dispositifs de formation à distance.

Les échanges pourront se poursuivre lors de la table ronde « Le tutorat dans les moocs »  organisée dans le cadre des 10 ans de t@d

__________________________

[1] Plusieurs de ces intentions peuvent cohabiter dans un même établissement et entretenir entre elles des rapports instrument-finalité différents.

[2] Rien n’empêche d’imaginer des MOOCs faisant appel à n’importe quelle variante pédagogique dans un contexte de distance. Cependant, en matière de fréquence, on devrait retrouver la même distribution des cours à travers les approches pédagogiques qu’on trouve dans l’enseignement universitaire.

Categories e-Tutorat, MOOC

Apport des approches et outils de remédiation

Remédiation et pédagogie différenciée

« Peut-on former sans différencier ? » la réponse est non.
Il est en effet impossible de séparer les deux concepts de pédagogie et de différenciation. Apprendre, comprendre, c’est faire sien les savoirs. C’est les ramener à du déjà connu que l’on enrichit. Aucun apprenant n’ayant les mêmes connaissances de base, la même expérience, les mêmes représentations, les mêmes besoins, les mêmes motivations, former c’est accompagner l’apprenant sur  son propre chemin vers le savoir.
La devise de la pédagogie différenciée est à chercher chez J-M Ketele : «  Parler moins, faire agir plus, et observer pendant ce temps » (« observer pour éduquer »).

Les approches de remédiation

Selon  Philippe Perrenoud,  «différencier,  c’est  rompre  avec  la  pédagogie  frontale  –  la  même leçon,  les  mêmes  exercices  pour  tous.  Il s’agit surtout mettre  en  place  une  organisation  du travail  et  des  dispositifs  didactiques  qui  placent  régulièrement  chacun  dans  une  situation optimale.  La  pédagogie  différenciée  consiste  à  utiliser  toutes  les  ressources  disponibles,  à jouer  sur  tous  les  paramètres  pour  organiser  les  activités  de  sorte  que  chaque  apprenant  soit constamment ou du moins très souvent confronté aux situations didactiques les plus fécondes pour lui. Il s’agit donc d’amener chacun à son plus haut niveau de compétence».

Cette approche est donc particulièrement efficace dans le cadre de formations individualisées pour adultes (particulièrement en blended-learning) où le tuteur met en œuvrer un travail réflexif approfondi en cohérence avec le projet individuel de l’apprenant, en s’appuyant sur des ressources pédagogiques en ligne, développées et ouvertes en fonction de chaque parcours. La remédiation est en fait une re-médiation. il s’agit alors pour le formateur-accompagnateur de mettre une nouvelle fois l’apprenant en relation avec le savoir, mais d’une manière différente, en s’appuyant sur son vécu et la mise en œuvre de ce qu’il apprend. Cette approche reste formative mais se situe à la frontière avec le coaching individuel.

Remédiation cognitive

Une application particulière de la remédiation est la « remédiation cognitive ».
Elle est particulièrement employée dans le champ de la formation des adultes (hors système formel).
Il s’agit de programmes dont l’ambition est de refonder les apprentissages logiques de base par des progressions pédagogiques, à base d’exercices centrés sur l’entraînement au raisonnement.

Selon les termes de l’Association Francophone de Remédiation Cognitive, « La remédiation cognitive a pour objectif de diminuer les déficits cognitifs des patients. Ces déficits se manifestent en particulier sous la forme de troubles de l’attention, de la mémoire et des fonctions exécutives (rendant les patients incapables de structurer comportement et langage). Dans la schizophrénie, ils prennent également la forme de troubles de la cognition sociale (qui empêchent les patients de comprendre les intentions, les désirs et les émotions d’autrui).

Apport des outils médiatisés dans la remédiation cognitive

Le projet Gaïa est le fruit d’une collaboration, pendant plus de 2 ans, entre l’Association Francophone de Remédiation Cognitive (AFRC), le Service Universitaire de Réhabilitation du CH Vinatier, le CHU vaudois et Dominique GROS (Tutoractiv). Il repose sur le développement d’un outil permettant de rééduquer la capacité des personnes souffrant de troubles psychotiques chroniques (dont la schizophrénie) à comprendre les émotions exprimées par le visage d’autrui.

Cet outil repose sur un ensemble de modules interactifs de remédiation (jeux de rôle) qui ont pour vocation d’être utilisés, sous la supervision d’un professionnel de la santé en situation d’assistance (testés par le département psychiatrie du CH le Vinatier à Lyon, préalablement à une diffusion à l’ensemble du réseau français).

Ce projet est décrit dans l’ouvrage écrit par le Docteur Nicolas Franck, pilote du projet : « Remédiation cognitive » – Éditeur: MASSON – Date de parution: 09/2012

Ces outils utilisent les mêmes composants qu’un module e-learning classique à la différence que des instants de pause réflexive sont scénarisés et les feedbacks d’exercices reconstruits, afin de permettre à la personne et son accompagnateur de prendre le temps d’analyser en face à face :
• les enjeux de chaque activité, les points d’attention
• les phases d’exécution (hésitations, points d’arrêt, fluidité …)
• le bilan des échecs et succès en cours d’exécution (apprentissage, ressenti)
• le transfert de l’expérience dans la vie de la personne (rappels, projections)

> Exemple d’un module de remédiation : http://goo.gl/k2mDv
> Module de présentation de l’ensemble de l’application : http://goo.gl/U5zRT

Évaluation technique :

L’application de remédiation a été développée intégralement avec un logiciel auteur de production
e-learning (elearning maker / E-DOCEO). Ce choix repose sur plusieurs avantages :

• le prix de revient compétitif de l’ensemble de l’application (une trentaine de modules développés et réajustés après test en grandeur nature)
• la capacité de la faire évoluer dans le temps (ajout de nouvelles situations, modification des feedbacks en fonction des retours d’utilisation et de médiation …). À cet effet, l’équipe projet du Centre de Réhabilitation à Lyon sera formée à l’utilisation de l’outil auteur.

Perspective d’utilisation de ce type d’outils en remédiation

L’intérêt d’utiliser des outils médiatisés dans des dispositifs de formation hybrides mixant présentiel et auto-formation à distance et tutorée ne fait plus débat aujourd’hui. On pourrait le résumer par cette formule : « économiser du temps dans le transmissif pour l’investir dans l’accompagnement ».

L’utilisation d’outils médiatisés évolués (en 2 et 3D)  en remédiation (c’est-à-dire, en accompagnement de réalisation par l’apprenant, par un tuteur en face à face) est sujette à de plus vives discussions.

Pourquoi investir dans le développement de tels outils s’il faut investir en sus dans la mobilisation d’un tuteur en phase d’exécution ? 
La question est évidemment cruciale. Quels sont les axes d’utilisation de tels outils (fortement médiatisés) nécessitant une remédiation assistée ?
Il s’agit de mettre la personne en « simulation en temps réel » pour observer directement ses capacités en situation et en discuter avec elle en même temps: est-elle capable de faire face, comment réagit-elle, quelles sont ses perceptions, ses rappels d’expérience ?

On peut évoquer :

•  Le recrutement à forts enjeux et avec un processus très structuré et stable
•  L’évaluation en situation de reconversion professionnelle ou de ré-orientation 
(mobilité interne)
• L’accompagnement individualisé (post ou pré-formation) de personnes nécessitant une approche différenciée complémentaire.

En résumé

Il s’agit de sortir des limites d’utilisation des tests psychotechniques standardisés qui ne fournissent aucune réponse en termes d’adaptation des profils aux situations professionnelles réelles.

L’avenir de Flash est dans le e-learning interactif et immersif

La polémique sur la mort de Flash, initiée par Apple et Microsoft semble s’apaiser.

L’attention est aujourd’hui portée sur la production d’environnements interactifs de haut niveau, grâce à la technologieFlash 11.

La dernière évolution de la solution RIA (Rich Internet Application) permet d’intégrer de manière spectaculaire l’affichage 2D et 3D.

Ce support devrait avoir un impact majeur pour le secteur des serious-game et celui des environnements d’apprentissage immersif (simulation), en se combinant avec des générateurs d’environnement 3D.

L’apport des générateurs de 3D Temps réel en Flash

Par exemple, Unity qui propose un logiciel de développement 3D temps réel et multimédia ainsi qu’un moteur 3D. Cette technologie est largement  utilisée pour la création de jeux en réseaux, d’animation en temps réel. Elle permet de produire des contenus interactifs comportant de l’audio, de la vidéo et des objets 3D.  Elle permet aussi d’exporter les environnements créés en format Flash, ce qui évite le téléchargement d’un player spécifique.

Conditions d’utilisation :

Ainsi la production de contenus d’apprentissage  permettant une immersion en situation réelle,
et bénéficiant d’un affichage et d’une réactivité homme-machine optimale est possible.
Elle met en œuvre les éléments suivants :

Côté Utilisateur :

  • PC avec carte graphique puissante et affichage grand écran
  • Haut débit

Côté Producteur :

  • Générateur 3D avec convertisseur Flash
  • Logiciel auteur e-learning avec des fonctions interactives puissantes (Flash)

Contenus d’apprentissage rich-média en immersion réelle

2 familles de contenus (espaces et objets)

  • Interaction sur les objets décomposables en contexte (physiques ou conceptuels)
  • Exploration et déplacement, dans un environnement multidimensionnel, en interagissant avec divers objets multimédia

Cible :

  • apprentissage d’un savoir-faire, proche de la réalité
  • remédiation en situation réflexive
  • positionnement ou évaluation en contexte

Ce positionnement est complémentaire des environnements sur HTML5 sur Tablettes et Smartphones, adaptés à des ressources e-learning de base.

Démonstration d’une application e-learning avec 3D temps réel en Flash

Une démonstration d’une application e-learning, ciblée pour un didacticiel produit (interaction sur un objet) et  intégrant la 3D temps réel est proposée sur : http://www.tutoractiv3v.com/LeDiamant/SCO_0001/default.htm

Elle est réalisée sur elearning maker (dernière version) intégrant une application 3D réalisée sur Unity. Elle a été réalisée en partenariat.

Une autre démonstration en 3D temps réel permet d’explorer un espace immobilier en agissant sur les éléments contenus (objets mobiles, variation de l’éclairage…).

Ce type de réalisation permet d’imaginer ce qu’il est possible de construire en simulation d’exploration d’un environnement physique ou naturel (étude de cas immersive). Voir : http://goo.gl/tbXhH

Les Moocs entre formation formelle et informelle

Les Mooc : Massive Open Online Course, impactent récemment le modèle du e-learning des universités américaines. Ce modèle qui se cherche encore aura-t-il des conséquences sur les dispositifs de formation à distance dans notre pays ?

La dernière réunion en ligne du mooc ITyPA (Internet Tout y est Pour Apprendre) a eu lieu le 13 décembre dernier. Il clôturait  les 11 semaines du premier Mooc francophone*. Voici quelques éléments de réponses et de mise en perspective.

Lors de mon « entrée en ITyPA » en octobre dernier, je me posais la question : « Je suis curieux d’apprendre comment chaque personne peut apprendre dans ce dispositif, quels sont les « stratégies » ou les « modèles » qui peuvent émerger. »

Pour commencer à y répondre, je prendrais comme point de départ l’article de Frédéric Haeuw Les MOOC pour apprendre en toute autonomie ?

Dans lequel il se pose la question  de l’apprentissage en réseau et plus précisément la question de l’accompagnement, d’où mon commentaire :

« N’est ce pas justement une des spécificités d’un Mooc que de laisser les apprenants face à leurs objectifs, et ensuite face à leur implication ? C’est-à-dire une voie intermédiaire entre une formation informelle via les réseaux sociaux et la formation conventionnelle, accompagnée. Un modèle « auberge espagnole » de la formation ? Dans ce cas les initiateurs ne sont en effet pas des « accompagnateurs » au sens fort du terme mais plutôt des « éclaireurs » qui marchent devant, suivis ou non. »

Massive individualisation ?

Les moocs s’appuient sur la capacité à s’autoformer, à développer l’apprenance collective. Cependant, une des valeurs ajoutées de la FOAD est à mon sens l’individualisation, lorsque le dispositif est bien pensé et s’en donne les moyens.

L’accompagnement est donc une condition sine qua non de l’individualisation qui permet l’approfondissement de savoirs et de compétences.

Dans le cas d’un mooc la notion de « massive » me parait, dans une première approche, à l’opposé de l’individualisation. La gestion et l’organisation des Moocs s’appuyant sur la quantité, d’apprenants, de contenus, de productions… comme en témoigne Michel Cornu lors de son intervention et qui rappelle larègle du 1% 

L’article de Régis Faubet des chiffres et des MOOCs fait état de la mine d’or statistique qui est en jeu par  la maitrise des Learning Analytics et de l’instructional design ou design d’apprentissage,  l’exploitation des données semble induire une orientation  behavioriste de la formation assez forte…

La réponse de Denys Lamontagne à ma question sur le « Modèle économique des Moocs : un peu de prospective » fournit aussi des éléments précieux sur la façon dont le directeur de Thot Cursus aborde les quantités d’apprenants francophones qui peuvent être mobilisés par les moocs.

Mooc ou Mool ?

Alors, pourquoi parler de cours ?
En cela je rejoins Frédéric Haeuw, en effet le mot cours fait référence au magistral et à un parcours composé de « contenus ».
Dans le cadre du Mooc Itypa le parcours était « balisé » mais les contenus  à créer par les participants. C’est plutôt du Massive Open Online Learning du Mool donc !
Ce qui donne en français ALOM : Apprentissage en Ligne Ouvert et Massif
On trouve aussi d’autres traductions et acronymes sur wikibooks.

En formation ce sont les possibilités numériques qui impactent la pédagogie, comme elles ont impacté les médias classiques et de nombreux domaines, mais le « modèle Mooc » ne semble pas encore défini et se cherche encore comme en témoigne cet article tout frais du Wall Street Journal.

En effet le modèle du Mooc connectiviste n’est pas celui d’un cours mais celui de l’apprentissage en  communautés de pratiques ou d’apprentissage, un peu plus formalisé. Un apprentissage hybride  qui mêle l’aspect vertical et descendant de la formation formelle à la nature horizontale des échanges entre pairs sur les supports qu’ils ont choisis.

Cette nature horizontale des échanges en communautés est certainement une des composantes qui permet à chacun de s’adapter aux situations de plus en plus complexes du monde professionnel, au contexte de décroissance et de concurrence, aux nouveaux enjeux auxquels nous faisons face actuellement, remettant en cause les modèles classiques.

L’intervention de Frédéric Domon sur l’apprentissage social a mis en évidence les rapports entre ces échanges horizontaux en formation, les facteurs bloquants au sein de certains modèles de circulation des informations et les enjeux liés aux sociétés apprenantes. Le lien ténu qu’il y a entre savoirs formels et investissement direct des apprentissages dans les pratiques.

Il est important de noter la différence entre CMooc, et XMooc, qui est bien mise en évidence dans le tableau réalisé par Rémi Bachelet sur wikipedia.

ITyPA était construit sur le modèle Cmooc, ou Mooc « connectiviste », les XMoocs proposant une approche plus classique de l’enseignement.

Quant aux remarques sur le taux d’abandon des Moocs, pourquoi appliquerait-on les mesures adaptées à la formation classique ? Dans un contexte de formation informelle, pourquoi  mesurer le taux d’abandon ? n’est il pas plus juste et plus judicieux d’évaluer ce que chaque apprenant a appris ?

Global / Local : quelles convergences ?

Alors, sur quel modèle les Moocs pourront-ils gérer quantité et individualité ?
Comment créer une convergence entre les Moocs et les dispositifs de formation de professionnelle continue ? Dans le contexte dans lequel les formateurs évoluent avec des apprenants « non initiés » ?
Une voie intéressante me parait d’établir un « relais » global / local, c’est-à-dire d’utiliser le principe des Moocs en lui adjoignant une composante accompagnement. Sous la forme de « regroupements » présentiels ou distants pour  retrouver les rôles d’accompagnement, de médiation, d’assistance, ceux soulignés par Karine Affaton dans Le formateur 2.0 , rôles nécessaires à l’individualisation. Ces regroupements informels se sont organisés spontanément lors du Mooc ITyPA sur certaines régions. Il s’agit donc d’un besoin réel des participants. Cette articulation  me parait être la composante indispensable de l’individualisation, dans le cadre d’une formation répondant aux critères réglementaires de la FPC.

Quel que soit le sujet d’un Mooc, aussi bien pour apprendre à faire du compost, de l’informatique ou de l’ingénierie, penser global et agir local nécessite de développer les réseaux de proximité, de relayer les contenus des Moocs dans un contexte de formation.

Quelles que soient les suites de ces prospectives, la comète Mooc ne nous attendra pas pour suivre son chemin. En attendant, merci aux animateurs du Mooc ITyPA Christine Vaufrey, Jean-Marie Gilliot et Anne-Céline Groleau et Morgan Magnin de nous avoir fait partager leur découverte !

*Cet article est le dernier des 4 qui retracent mon parcours du mooc ITy-PA que vous pouvez retrouver sur http://www.elearncom.fr/category/mooc

Categories MOOCTags

La motivation : un des enjeux cruciaux d’un module e-learning

L’efficacité d’un module e-learning dépend d’un facteur essentiel : la motivation.

Cette motivation, pour suivre un parcours de formation e-learning, dépend de facteurs exogènes comme la qualité du dispositif de formation, la consistance du projet de formation de l’apprenant, ou la densité du tutorat et de la relation avec ses pairs.

La motivation en auto-apprentissage repose  sur la qualité intrinsèque du module et aussi sur les comportements d’apprentissage mis en œuvre par le module.

Il appartient donc au concepteur d’être vigilant pour respecter un certain nombre règles.

Ces règles découlent directement des acquis actuels des sciences cognitives. On pourrait les résumer ainsi :

Le cerveau est un ordinateur lent et imprécis à la base mais il devient efficace grâce aux buts qu’il  se fixe et aux émotions positives qu’il produit. Chaque fois que nous faisons un pas vers nos buts, nous rencontrons des obstacles. Pour les surmonter, le cerveau est doté d’un système de prise de décision, par rationalité ou par émotion. S’il a peu de temps pour décider, il décidera de manière émotionnelle, en pariant et en jouant. Ce jeu doit être gagnant pour poursuivre l’effort.
Le cerveau s’améliore constamment. Il apprend ce qui a été un succès et il l’automatise pour répéter ce comportement de manière économique. C’est cela la motivation.

Voici donc 5 règles qui semblent des évidences. Cependant, leur application est parfois problématique dans les projets.

L’évaluation de l’utilisation des contenus par les apprenants montrent souvent qu’elles ne sont pas respectées.

Règle 1 : l’apprenant doit mesurer en permanence la probabilité qu´il a de réussir sa formation.

Plus cette probabilité est grande (ou grandit), plus l´apprenant sera motivé à poursuivre. L’expérience montre que fournir, au préalable, une information sur le niveau de difficulté (ou le pré-requis), n’offre pas une garantie suffisante (elle est ressentie comme une promesse). En fonction du profil d’apprentissage de l’apprenant et de l’équilibre des ressources du module (types de médias associés), la probabilité de réussite peut chuter ou croître en progression. La seule stratégie fiable consiste à développer des contenus équilibrés (effets appropriés de redondance en mixant des médias différenciés) et à favoriser une auto-évaluation des acquis progressive.

Règle 2 : le parcours de formation en ligne doit rester cohérent.

Toute forme d’incohérence dans le contenu, dans l´ergonomie des interfaces ou dans le fonctionnement de navigation interne est à proscrire. Cette règle se heurte à l’insuffisance de certains logiciels auteurs (en open source notamment) de travailler souplement sur des gabarits de modèles de contenu personnalisables. Elle se heurte aussi au désir de certains commanditaires de projet de rechercher l’originalité, l’image marketing au détriment de l’efficacité pédagogique.

Règle 3 : L´apprentissage par la pratique est la clé.

Il est primordial, dans un module en ligne, de faire réaliser des activités autoévaluées (pratiques et contextualisées) par les apprenants. Il s’agit, pour eux, de valider ou mettre en situation leurs acquis, au fur et à mesure de leur progression puis en fin de module. Ceci impose un maximum d ‘efficacité dans le processus de conception et de production : s’appuyer sur les experts métiers qui doivent fournir la bonne matière réflexive, scénariser le contenu de manière soignée sans tomber dans le piège économique du « rapid-learning », utiliser enfin des logiciels auteurs évolués qui offrent une galerie d’activités d’apprentissage riche et non limitée à des exercices répétitifs et simplistes (batteries de QCM par exemple).

Règle 4 : Les objectifs pédagogiques et d’activités doivent être explicites et tangibles.

Les apprenants sont motivés par des objectifs pédagogiques clairs. Ils doivent être énoncés précisément dès le démarrage du module. Ces objectifs doivent être univoques et limités pour cadrer le grain. L’objectif doit perçu comme accessible et stimulant au fur et à mesure de la progression. Pour ce faire, il doit être traduit en objectifs opérationnels qui permettent directement à l’apprenant de mesurer qu’il atteint la cible au fur et à mesure de sa progression, en interagissant avec le contenu. Cette exigence ramène directement à la règle précédente qui est d’offrir à l’apprenant des activités autoévaluées et contextualisées. Il importe aussi d’offrir des interactions utiles permettant de valider sa compréhension (par exemple : cliquer sur une question de réflexion ou un point clé avant d’obtenir la réponse ou son affichage). Ne jamais oublier que l’interaction est au service de la pédagogie et non de l’esthétisme.

Règle 5 : Les messages doivent être condensés et clairs.

L’apprenant ne dispose, dans le grain, que de quelques minutes pour acquérir ce qui doit être compris et valider ses acquis. Le contenu doit être précis, écrit dans une langue claire. Les messages ne doivent pas être dilués dans des détails qui n’appartiennent pas au contenu médiatisé mais à son environnement tutoral ou relationnel. Enrichir un contenu peut le rendre inefficace. Par exemple ; la mascotte  n’est présentée que pour assurer qu’une fonction relationnelle (reformulation d’acquis, feed-back, positionnement d’avancement …).

Comment les tuteurs peuvent aider les apprenants à distance à faire face à leurs conflits cognitifs

Dans une approche constructiviste de la formation dont se réclament de nombreux dispositifs de formation à dista nce ou hybride, un des principes mis en œuvre est l’exposition des apprenants à des conflits cognitifs. Quel peut-être le rôle du tuteur à distance pour aider les apprenants à vivre et à surmonter ces conflits cognitifs, tel est le p ropos de ce billet.

Principes du constructivisme

Le constructivisme est lié au concept de viabilité. L’individu, et lui-seul, peut estimer ses connaissances viables, c’est-à-dire lui permettant de faire face aux différentes situations qu’il vit. Lorsqu’il est dans l’incapacité de résoudre une difficulté, c’est parce que l’ensemble des connaissances qu’il a construit au cours de ses différentes expériences de vie, dont l’apprentissage, se révèlent non viables. Dans l’entretien que j’ai eu, il y a quelques années, avec André-Jacques Deschênes, celui-ci donne un exemple qui permet de mieux saisir le concept de viabilité : « à chaque fois que je regarde par la fenêtre de mon bureau, je construis ma vision (mon expérience) de cette partie du monde qui est visible de cette fenêtre. Cette partie du monde est différente à chaque moment où je la regarde car un ou plusieurs éléments ont changé depuis la dernière fois que j’ai regardé par la fenêtre. De manière générale, cette construction ne produit pas de nouveaux apprentissages. J’arrive à interpréter ce que je vois à partir de mes expériences passées, autant celles de regarder par cette fenêtre que mes autres expériences du monde et bien qu’à chaque fois, des éléments changent, il m’est toujours possible de considérer cette expérience comme satisfaisante parce que tout ce que j’observe est conforme à ce que j’ai expérimenté dans le passé et à ce que je peux présumer expérimenter dans ces conditions. Si par ailleurs, je voyais un lion par ma fenêtre… il me faudrait construire quelque chose d’autre pour interpréter cette expérience… souvent, on explique l’apprentissage d’un point de vue constructiviste par un conflit cognitif que je dois résoudre. Dans mon cas, c’est de voir un lion par la fenêtre de mon bureau, dans la neige au Québec en février… selon mes expériences passées, ce n’est pas possible. Je dois alors construire quelque chose de neuf. Cette construction va se réaliser soit essentiellement avec des expériences passées (en les accumulant différemment) ou en combinant ces dernières avec des éléments nouveaux (nouvelles expériences) que je tire de l’environnement… »

En situation d’apprentissage et plus particulièrement dans le contexte de la relation tutorale, les principes importants du constructivisme à investir sont le s suivants : « i) le développement de perspectives multiples qui consiste à traiter une information en adoptant des angles différents pour en découvrir les diverses composantes, ii) la négociation qui représente un ajustement des connaissances par la prise en compte du point de vue des autres membres de la communauté des praticiens et des experts dans un domaine, iii) la contextualisation qui renvoie à une manipulation des connaissances dans une situation authentique, iv) la collaboration qui consiste en une interaction de l’apprenant avec les pairs fondée sur la complémentarité des compétences de chacun. » (cf. Description d’un système d’encadrement par les pairs et de la formation des pairs anciens)

Les occasions de conflits cognitifs liées aux principes du constructivisme

Le développement de perspectives multiples en situation d’apprentissage demande de mettre à disposition des apprenants une pluralité de discours sur l’objet d’apprentissage. L’enseignement ne se limite donc pas à la production et la diffusion du seul discours de l’enseignant mais demande une mise à disposition de plusieurs discours qui peuvent être en tension les uns avec les autres. L’enseignement n’est plus la transmission d’une bonne parole mais l’exposition des apprenants à des visions différent es portées sur l’objet d’apprentissage.

L’apprenant qui rencontre cette situation d’enseignement pour la première fois ressent fréquemment du trouble, peut être déstabilisé, habitué qu’il a été lors de ses expériences de formation précédentes à recevoir ce qu’il faut savoir. L’approche constructiviste qui réclame à l’apprenant de faire son miel de différents discours l’amène ainsi à vivre un premier conflit cognitif.

La négociation du sens par la confrontation des différents miels produits par les apprenants et ceux des experts, formateurs et tuteurs constitue également une occasion d’émergence de conflits cognitifs. S’apercevoir que l’autre, à partir des mêmes ressources et discours proposés, a construit, fort de ses expériences passées, une autre viabilité que la sienne, confronte l’apprenant à l’expression critique pour laquelle ses expériences de formation antérieures ne l’ont pas forcément préparé.

La contextualisation en formation des adultes correspond à la réalisation d’activités d’apprentissage qui sont les plus proches des situations professionnelles ou d’autres situations vécues et à vivre par les apprenants. La notion de situation authentique est au cœur du constructivisme. Elle permet de penser et concevoir des exercices, études de cas, jeu de rôle, etc. à destination des apprenants au cours desquels, ils doivent transférer leurs connaissances, et ce dès le temps de la formation. Ceci  aménage la possibilité d’évaluer la réalité du transfert qui est le marqueur principal du développement d’une compétence. Si rejoindre les intérêts des apprenants par l’entremise d’activités d’apprentissage basées sur des situations authentiques n’est pas générateur de conflit cognitif particulier, il n’en est pas de même pour l’évaluation de la qualité du transfert des connaissances construites et des compétences développées. Par exemple, un apprenant peut ne pas s’autoriser à s’autoévaluer convaincu que l’évaluation est de la seule prérogative du formateur ou du tuteur.

La collaboration entre apprenants qui est tenue pour essentielle par les constructivistes et plus encore par les socio-constructivistes peut également être génératrice de conflits cognitifs. Outre les occasions de conflits cognitifs propres à toute initiative collective et à la dynamique des groupes, la mise en situation de collaboration peut venir heurter les représentations que les apprenants ont du processus d’apprentissage et de la formation en général. Ceci est plus particulièrement vrai en formation à distance dont la modalité est parfois choisie par l’apprenant pour échapper à la présence du groupe-classe. De plus, la formation à distance en offrant davantage de possibilité d’individualisation et de personnalisation que les situations présentielles relativise de fait le poids du groupe que les activités collaboratives tendent à réintroduire.

Les effets du conflit cognitif sur les apprenants et les interventions tutorales permettant d’y répondre

Face à un conflit cognitif, une première réaction de l’apprenant est son refus qui entraine la non prise en compte des nouvelles informations venant perturber ses connaissances antérieures. Non, il est impossible que le lion soit là.

Il est certain qu’une attitude péremptoire du tuteur à distance peut difficilement permettre à l’apprenant d’accepter d’examiner la nouvelle expérience à laquelle l’apprentissage le confronte. Les arguments d’autorité seront de faible poids face au refus. Il lui faut donc agir différemment. La première intervention tutorale à entreprendre est d’amener l’apprenant à réfléchir sur les causes de son refus. Dans un second temps, le tuteur peut apporter des informations sur ce qu’est le processus d’apprentissage et qu’il est naturel d’imaginer pouvoir fuir le conflit cognitif. Il sera alors amener à argumenter sur le fait que le conflit cognitif est à la base de l’apprentissage. Il aura ensuite à accompagner l’apprenant dan s son processus d’articulation de ses connaissances antérieures avec les nouveaux apports des discours d’enseignement. Enfin, lorsque l’apprenant aura accepté de vivre son conflit cognitif et de le dépasser, il pourra utilement proposer à l’apprenant des activités métacognitives lui permettant de faire le point sur son vécu du conflit cognitif. Ceci est susceptible d’amoindrir les effets cognitifs et émotionnels vis-à-vis des prochains conflits cognitifs qu’il sera amené à vivre dans sa formation.

Une autre manière de fuir le conflit cognitif pour l’apprenant est non pas de le refuser mais de l’ignorer ou de faire comme s’il n’existait pas. Le lion n’est pas là et d’ailleurs je ne le regarde pas. Il se met alors dans une situation comparable à l’ignorance caractérisée par le fait qu’il ne sait pas qu’il ne sait pas. Le travail du tuteur consiste, à ce moment-là, à faire progresser l’apprenant vers la reconnaissance de son absence de connaissances vis-à-vis des nouveaux apports et de son manque d’habileté, temporaire, à procéder à leur articulation avec ses connaissances antérieures. L’apprenant devient ainsi capable de formuler ce constat nécessaire à la mise en action d’apprentissage : je sais que je ne sais pas.

Un autre effet du conflit cognitif sur l’appren ant est le développement d’un sentiment d’insécurité. Le lion va certainement bondir sur moi. Conscient qu’il ne sait pas, il est dans la situation de celui qui ne sait pas qu’il sait. Il se retrouve submergé par les nouveaux apports et arrive à ne plus repérer qu’il possède des connaissances antérieures qui vont l’aider à assimiler les discours d’enseignement auxquels il est exposé. Le rôle du tuteur est clairement de le rassurer en lui faisant prendre conscience que non seulement il peut arriver à interpréter les éléments nouveaux mais que c’est bien à partir de ce qu’il sait déjà qu’il va y arriver. Pour ce faire, la proposition d’activités d’émergence des connaissances préalables des apprenants avant même tout apport se révèle être une prévention efficace contre le sentiment d’insécurité lié au conflit cognitif. L’apprenant insécurisé doit faire l’objet d’un suivi attentif de la part du tuteur dans la mesure où il peut en arriver à perdre l’estime de soi puis nourrir un désir d’abandon de sa formation.

D’autres apprenants peuvent au contraire être avides de conflits cognitifs. Je vais mettre la tête dans la gueule du lion. Si l’enthousiasme à se voir bousculé dans ses connaissances antérieures est une attitude propice à l’apprentissage, tout apprenant, à un instant donné de son apprentissage, possède des limites d’acceptation de l’altérité. Lorsque ces limites sont dépassées, les réactions peuvent être diverses et rejoindre celles évoquées ci-dessus. Le tuteur peut donc encourager l’apprenant à  poser un regard réflexif sur son appétence pour le conflit cognitif afin non pas de la modérer mais de la mettre en perspective et de vérifier si elle reste, ou non, dans le cadre de ses objectifs d’apprentissage.

Si aujourd’hui, le constructivisme a, et je m’en réjouis, les faveurs d’un plus grand nombre de concepteurs de formation à distance ou hybrides, il apparait essentiel que les tuteurs à distance puissent être formés à intervenir auprès des apprenants exposés aux conflits cognitifs. Ceci ne semble pas trop difficile à imaginer tant il est vrai que pour de nombreux formateurs et enseignants amenés à investir des fonctions tutorales, le changement de posture demandé est source de conflit cognitif.