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Auteur/autrice : Jacques Rodet

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Les différents types d’ingénierie tutorale

Depuis une douzaine d’années, j’ai progressivement conceptualisé et formalisé l’ingénierie tutorale. Ce travail de réflexion est le résultat de plusieurs processus conjoints. D’une part, mes interventions de conseil auprès d’organisations porteuses de projet e-learning, d’autre part, mes enseignements universitaires à l’UVSQ, Rennes 1 et Toulouse Le Mirail (388 étudiants formés à la conception des services tutoraux) et mes actions de formation relatives à tel ou tel autre aspect de l’ingénierie tutorale (plus d’un millier d’apprenants). A cela s’ajoute, les différents séminaires, colloques et conférences réalisés sur le sujet, les échanges avec de nombreux collègues, l’activité au sein de t@d. Plusieurs dates constituent des témoins de l’évolution de ma pensée : en 2003 la typologie des plans de supports à l’apprentissage, en 2010 mes propositions pour l’ingénierie tutorale, en 2012 le croisement des fonctions tutorales et des plans de supports à l’apprentissage, en 2014 la formalisation du processus d’audit de la performance tutorale et les méthodes de priorisation des besoins de soutien des apprenants. En 2015, les indices de gravité et de probabilité pour une étude de criticité appliquée à l’ingénierie tutorale.

Selon ma définition de 2010, « l’ingénierie tutorale rassemble les différentes actions qui peuvent être menées lors de la phase de conception d’une formation à distance ou d’une formation hybride pour penser et dimensionner les services tutoraux qui seront offerts aux apprenants ». (1) Ces actions sont rassemblées en trois livrables, i) le système tutoral qui vise à identifier les besoins de soutien des apprenants, à les prioriser et à définir les profils de tuteurs, ii) le scénario tutoral qui permet de concevoir, de positionner et de quantifier les interventions tutorales, de préciser les outils qui seront utilisés pour les réaliser et de rédiger la charte tutorale, iii) le plan de diffusion qui organise la formation des tuteurs et de leurs communautés de pratiques, l’élaboration d’outils de suivi de la relation tutorale et la définition du modèle économique du dispositif tutoral.

Si dès 2010, la notion d’évaluation n’est pas absente de mon propos (« L’ingénierie tutorale relève plus d’un processus – pro au sens de « vers l’avant » et de cessus aller, marcher – d’actions à enclencher pour améliorer la qualité du tutorat et produire un système tutoral opérationnel ») c’est au fil de mes interventions de terrain que le recours à l’audit s’est davantage formalisé et traduit par un dispositif d’Audit de la Performance Tutorale, APT’. (2)

Le travail sur le terrain m’indique que si la conceptualisation est précieuse, la mise en oeuvre de l’ensemble des actions d’ingénierie tutorale n’est pas systématique. En effet, en fonction du contexte, du temps disponible, des budgets consentis, ce ne sont que quelques actions préconisées par l’ingénierie tutorale qui sont effectivement réalisées. Par exemple, un dispositif de formation existant dont les résultats en terme de persévérance des apprenants sont faibles nécessite tout d’abord la réalisation d’un audit de performance tutorale suivi d’actions de ré-ingénierie du scénario tutoral puis d’une mise à niveau des compétences des tuteurs. Autre exemple, la diffusion prochaine d’une formation en ligne amène son institution à se poser (tardivement), la question de la constitution d’une équipe de tuteurs. Ainsi ce sont les actions de formation et de constitution d’une communauté de pratiques des tuteurs qui sont le point de départ de l’ingénierie tutorale. Dernier exemple, une organisation souhaite calculer le ROI de sa pratique tutorale. Cela passe par une identification précise des coûts du tutorat et celle des gains que sa mise en oeuvre à permis de réaliser. C’est le modèle économique qui est ainsi le point de départ d’une action plus large d’ingénierie tutorale.

Il apparaît donc que l’approche théorique que j’ai proposée en 2010 (ci-dessous l’ingénierie tutorale déductive) n’est pas le seul type d’ingénierie tutorale mis en place sur le terrain. D’un point de vue conceptuel mais également opérationnel, il est nécessaire d’adjoindre à la production des livrables la réalisation d’un audit permettant d’engager l’institution dans un processus d’évaluation et d’amélioration continu de son dispositif tutoral.

Afin d’y voir un peu plus clair, je propose ci-dessous une typologie des différentes ingénieries tutorales en fonction de la production effective ou non des trois livrables et de l’audit de performance tutorale.

Types

Les 4 types de niveau basique

theorique

conceptuelle

pragmatique

empirique

Les 4 types de niveau intermédiaire

strategique2

tactique2

déductive

inductive

Le type de niveau élevé

optimale2

___________________________

(1) Rodet, Jacques (2010) Propositions pour l’ingénierie tutorale
http://jacques.rodet.free.fr/tutoral7.pdf

(2) APT’ Audit de Performance Tutorale
http://www.jrodet.fr/APT/index.htm

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La réactivité ascendante, et quelques autres modalités d’accompagnement des apprenants à distance dans les réseaux sociaux massifs d’apprentissage (RSMA)

Si le « stage » de formation impliquant le rassemblement d’un groupe restreint (5 à 20 personnes) constitue encore une des formes les plus répandues de l’accès à la formation professionnelle, si les universités s’ingénient encore et toujours à investir dans l’immobilier et la construction de vastes amphis, le développement des formules de formation à distance et hybrides tant initiale que continue préfigure notre futur proche où l’unité de temps et de lieu, le regroupement des apprenants en un espace physique, dit d’apprentissage (en fait, le plus souvent d’enseignement), ne seront qu’une étape remarquable mais révolue de l’évolution des formes éducatives.
A cet égard, le nouveau cadre défini par la loi sur la formation professionnelle du 7 mars 2014 constitue une avancée prometteuse. Il apparait notamment que la preuve de l’effectivité de la formation ne passe plus par le seul canal de la feuille de présence mais par la fourniture de preuves des apprentissages réalisés, telles que des réalisations d’activités dont les livrables peuvent être collationnés au sein d’un e-portfolio par exemple.[1]
De nombreux facteurs poussent au changement mais je n’en évoquerai ici que deux qui me paraissent les plus puissants. Les besoins de formation sont en constante progression. D’une part, les études s’allongent, concernent des franges de plus en plus grandes d’une génération (en France, la licence est promise à 50% d’une classe d’âge), la population mondiale n’en finit pas d’augmenter, le développement des puissances émergentes mais également des autres pays passe par celui de l’éducation et de la formation de leur population. D’autre part, la durée de validité d’une connaissance se raccourcit considérablement et impose une réactualisation continue des compétences des individus. En 2000, l’Union Européenne dans son mémorandum sur l’éducation et la formation tout au long de la vie[2] formulait notamment les messages suivants :
§ permettre l’acquisition ou le renouvellement des compétences nécessaires à une participation soutenue au sein de la société de la connaissance ;
§ introduire des innovations dans l’enseignement et l’apprentissage en élaborant des méthodes efficaces pour l’offre interrompue d’éducation et de formation tout au long de la vie et dans tous les domaines de la vie ;
§ rapprocher le plus possible l’offre d’éducation et de formation tout au long de la vie aux besoins des citoyens.

Il est donc demandé aux institutions (universités, centres de formation, écoles…) d’accueillir un nombre toujours plus grand d’individus dans des formations dont le contenu est à renouveler, à créer en permanence afin de les former aux métiers qui n’existent pas encore.[3]

Une des conséquences qui peut être tirée de ces constats est que la formation de groupes restreints, indépendamment de son niveau d’efficience, ne correspond plus aux enjeux sociétaux actuels.

Du groupe restreint au réseau social d’apprentissage

Si les groupes restreints ont fait l’objet de nombreuses recherches dès les années 70,[4] et qu’elles ont pu être contextualisées au domaine de la formation, il n’en va pas de même pour les grands groupes ou les groupes massifs (plusieurs centaines de milliers d’individus). Il existe pourtant des théories telle celle des quatre chambres du changement de Claes F. Janssen,[5] ou la Théorie Organisationnelle de Berne (TOB)[6] mais celles-ci ne semblent pas avoir été adaptées de manière consciente dans les dispositifs de formation rassemblant de grandes masses d’apprenants.

Les très grands groupes d’apprenants
Il existe depuis une vingtaine d’années des expériences de formation à grande échelle à travers la mise en place de dispositifs numériques. Ainsi, le futur est déjà présent. C’est bien dans les multinationales et les entreprises nationales de grande taille, disposant d’un maillage serré du territoire, que le e-learning s’est d’abord implanté. Toutefois, il a été souvent fait peu de cas de l’accompagnement des individus et de la possibilité d’échanges entre eux. De manière plus récente, le dispositif de formation continue à distance M@gistère[7] visant les professeurs des écoles (plus de 350 000) affirme clairement son ambition d’accompagnement des apprenants. S’il est encore tôt pour en faire le bilan, l’accompagnement est organisé selon un modèle de démultiplication engageant de nombreux acteurs tant nationalement que dans les académies et leurs circonscriptions. L’idée générale est d’offrir un accompagnement à chaque professeur des écoles au plus près de son affectation. La logique de proximité géographique de cet accompagnement apparait principalement liée à l’organisation territoriale hiérarchique de l’Education Nationale et ne favorise donc pas la constitution d’un véritable réseau social d’apprentissage entre tous les professeurs des écoles de France. Les Moocs peuvent potentiellement rassembler de très nombreux apprenants et c’est en leur sein que le réseau social d’apprentissage pourrait trouver un terrain d’expérimentation. Toutefois, dans ces dispositifs, les interactions entre apprenants et leur accompagnement ne sont que relativement peu pensés et organisés et il est fait volontiers le pari de la spontanéité des échanges entre pairs.
Il apparait donc que ce que je dénomme désormais les réseaux sociaux massifs d’apprentissage (RSMA) restent encore plus une spéculation théorique qu’une pratique observable.

Proposition de définition du réseau social massif d’apprentissage
Il existe fréquemment une confusion entre le réseau social comme outil, d’une part, et comme entité, d’autre part. Les outils de réseaux sociaux sont très nombreux et leurs usages très répandus (26 millions de comptes français sur Facebook). L’utilisation de ces outils en formation est beaucoup moins massive et je constate chaque année auprès d’étudiants de 1ère année universitaire que ces outils ne sont pas considérés d’emblée comme des supports d’apprentissage mais utilisés pour des buts amicaux et familiaux, au mieux de personnal branding.[8]
Par ailleurs, il faut bien constater que si les réseaux sociaux offrent des modalités communicationnelles variées (posts, commentaires, messagerie instantanée, communication audio-visuelle), celles-ci ne recouvrent que partiellement les besoins d’échanges et d’accompagnement au sein d’une formation. Par exemple, le parti-pris du flux antéchronologique est pertinent dans une logique informationnelle mais beaucoup moins dès lors que le contexte du message doit être pris en compte par les interlocuteurs pour en avoir une bonne interprétation et l’utiliser à bon escient. Aussi, si les outils de réseaux sociaux sont utiles, ils ne devraient pas prescrire et circonscrire, par leurs limites et leurs contraintes, les usages pédagogiques des RSMA.
Si un RSMA ne peut réellement exister sans outil de réseau social, il ne s’y limite pas et la combinaison avec d’autres outils tels que les LMS est largement souhaitable. Ainsi, Par RSMA, j’entends, en premier lieu, les interactions de dizaines ou de centaines de milliers d’apprenants réunis au sein d’un dispositif de formation, composé d’espaces divers, qui facilitent l’atteinte de ses objectifs par chaque apprenant. De manière plus précise, voici les dix premières conditions nécessaires qui m’apparaissent nécessaires à l’existence d’un RSMA :
  1. L’existence d’une formation en ligne ou hybride
  2. Un groupe massif d’apprenants (de quelques milliers à plusieurs centaines de milliers)
  3. La volonté d’horizontaliser les communications entre tous les participants
  4. Une stratégie d’accompagnement annoncée et appliquée
  5. Une définition des rôles des participants (de consommateur à producteur)
  6. Une charte précisant les droits et devoirs des participants
  7. La présence de formateurs, tuteurs, animateurs
  8. Un ou des outils de réseaux sociaux permettant de structurer, de mémoriser et de retrouver les échanges entre les participants
  9. Des outils permettant d’évaluer la cohésion et la productivité
  10. Des instances d’auto-régulation
Si une présentation détaillée de ces différentes conditions serait nécessaire, je me concentrerai, ici, à formuler quelques propositions concernant la quatrième.

Propositions pour l’accompagnement des participants d’un RSMA
La formation à distance a parfois été présentée comme la massification de l’individualisation. Ceci n’est pas faux mais l’individualisation est davantage liée aux tâches d’ingénierie pédagogique de modularisation et de granularisation du contenu qui permettent d’offrir une diversité de parcours aux apprenants en fonction de leurs objectifs, de leurs connaissances préalables, du temps dont ils disposent, etc., qu’à l’accompagnement. Individualiser ne concerne pas précisément l’accompagnement en cours de formation. C’est dans le cadre de la personnalisation que peuvent être prises en compte les caractéristiques personnelles de l’apprenant par un accompagnateur, un tuteur.[9] Il s’agit donc de repérer les formes que la personnalisation de l’apprentissage, par le recours aux différents types d’accompagnement de l’apprenant, peut prendre dans le cadre d’un RSMA. Ci-dessous, je formule un premier lot de propositions qui sont des adaptations aux RSMA de pratiques tutorales déjà éprouvées dans d’autres dispositifs de formation à distance, puis j’évoque rapidement un exemple de modalité d’accompagnement issue des pratiques de réseaux sociaux, enfin je présente la réactivité ascendante.

Adaptation aux RSMA de pratiques tutorales déjà éprouvées
Proposition 01. L’accompagnement doit faire l’objet d’une stratégie élaborée lors d’actions d’ingénierie tutorale[10] qui précèdent la diffusion du dispositif.[11]
Proposition 02. Les rôles et fonctions, ainsi que les modalités des différents acteurs de l’accompagnement doivent être décrits et leurs champs d’intervention précisés. Ils peuvent l’être à partir des fonctions tutorales et des plans de support à l’apprentissage à investir.[12]
Proposition 03. Les modalités d’accompagnement doivent être variées : experts, tuteurs, tuteurs-pairs ou community managers, pairs, ressources de support à l’apprentissage.[13]
Proposition 04. La proactivité des accompagnateurs est indispensable. Une constante dans l’accompagnement est que ce sont rarement ceux qui ont le plus besoin d’être accompagnés qui sollicitent d’eux-mêmes les services d’accompagnement. La proactivité consiste, pour les accompagnateurs, à rejoindre les apprenants là où ils sont et les encourager à s’engager dans la relation d’aide.[14]
Proposition 05. Les modalités d’accompagnement doivent être présentées très clairement aux apprenants. Le recours à une charte tutorale étant conseillé.[15]

Exemple de modalité d’accompagnement issue des pratiques de réseaux sociaux
Proposition 06. Le choix des outils de réseaux sociaux doit idéalement être réalisé avec les apprenants en amont de la formation et être guidé par le respect des critères d’accessibilité de l’outil et d’acceptabilité[16] par les utilisateurs.
Parmi les fonctions qui peuvent être très utiles pour aider l’apprenant à faire face à la masse d’informations en provenance des participants du RSMA, un système de notes ou d’appréciations, davantage comparables à un système d’étoiles qu’à un simple « j’aime » se révèle très utile. Une ressource peut ainsi être évaluée par tous les participants. Il est également possible de distinguer ces appréciations en fonction du rôle des participants. Ainsi, une ressource, mais aussi tout message qui a eu lieu dans le RSMA, peut faire l’objet d’une appréciation. Une ressource peu cotée par les experts mais plébiscitée par les apprenants, ou inversement, permet au participant d’avoir des éléments d’appréciation plus divers. De même, les commentaires qui sont attachés à une ressource ou un message deviennent des ressources évaluées.

Proposition 07. La réactivité ascendante
Je propose que la réactivité des accompagnateurs soit ascendante, c’est-à-dire organisée en niveaux successifs selon le modèle suivant : i) L’apprenant est son premier soutien et peut s’appuyer sur les ressources de support à l’apprentissage ; ii) S’il ne trouve pas de réponses satisfaisantes dans les ressources de support à l’apprentissage, il interroge ses pairs ; ii) Si les pairs ne l’aident pas, ce sont les tuteurs-pairs qui prennent le relais ; iii) Si les tuteurs-pairs ne l’aident pas, ce sont les tuteurs de l’équipe pédagogique qui prennent le relais ; iv) Si les tuteurs de l’équipe pédagogique ne l’aident pas, ce sont les experts qui prennent le relais.

Ceci constitue une véritable alternative à la démultiplication qui n’est pas adaptée au RSMA car n’autorisant pas d’échanges de tous vers tous. Avec la démultiplication on va, de manière descendante, de un vers quelques-uns qui à leur tour vont vers d’autres plus nombreux qui à leur tour accompagnent un groupe restreint d’apprenants. Dans la réactivité ascendante, on part de l’apprenant mais il s’adresse d’abord au plus grand nombre et c’est dans la mesure où il n’y a pas d’aide apportée que le niveau d’intervenants plus spécialisés et moins nombreux est sollicité. Il est à noter que la réactivité ascendante propose une solution à l’impasse que j’avais relevée l’an dernier dans la typologie du tutorat dans les moocs.[17] En effet, il est impossible, pour des raisons organisationnelles et financières de dimensionner le tutorat réactif de la même manière dans un mooc rassemblant des centaines de milliers d’apprenants que dans une FOAD s’adressant à quelques dizaines d’apprenants.

Un des avantages collatéraux de la réactivité ascendante est qu’elle est beaucoup moins coûteuse que les systèmes d’accompagnement habituels. En effet, elle est redevable à la démarche du don et contre don.[18] En particulier, les pairs, voire les tuteurs-pairs (anciens apprenants) sont des volontaires recherchant une reconnaissance symbolique et cognitive, souhaitant nourrir un sentiment d’appartenance à une collectivité, poursuivant des buts personnels : autant de ressorts motivationnels qui ne nécessitent pas forcément d’être accompagnés d’une rétribution financière.[19] C’est à leurs niveaux que la plupart des demandes de soutien des apprenants trouveront leurs solutions. Les tuteurs et experts déchargés de l’accompagnement courant ont la possibilité de se concentrer sur les interventions où leur plus-value est réellement nécessaire. Ils peuvent ainsi être à la disposition d’un nombre massif d’apprenants puisque leur périmètre d’intervention est plus réduit.

Par ailleurs, une bonne part de leurs interventions personnalisées est capitalisable dans de futures ressources de support à l’apprentissage.
L’économie de l’accompagnement est alors modifiée en profondeur. De manière habituelle dans le e-learning, elle est fondée sur la quasi absence de coûts fixes relatifs à l’absence de conception et des coûts variables corrélés au nombre d’apprenants qui deviennent insupportables dans le cas d’un RSMA. Dans la réactivité ascendante, il est nécessaire de faire des investissements initiaux relatifs à l’ingénierie tutorale et dans la production des ressources de support à l’apprentissage mais les frais variables sont davantage circonscrits et leur variabilité est moins corrélée au nombre d’apprenants.

La limite de la réactivité ascendante est que l’apprenant ne dispose plus d’une personne-ressource qui puisse le suivre tout au long de sa formation. C’est là que les outils peuvent nous aider. Les promesses du standard xAPI[20] laissent entrevoir la possibilité d’une réorganisation à la demande des traces et communications d’un apprenant permettant d’en restituer l’historicité et le sens. Si l’outil est bien en peine de traduire la dimension affective d’une relation pédagogique duale, il est possible, que celle-ci devienne moins essentielle à l’individu qui s’engage comme apprenant dans un RSMA ou qu’il soit davantage préparé à supporter ce manque ou encore qu’il soit prêt à acheter le service d’accompagnement supplémentaire qui lui fournirait cette écoute empathique.

Je ne pense pas que les RSMA soient l’alpha et l’omega du futur de la formation et de l’accompagnement. Il suffit d’inverser les termes de l’aphorisme de Philippe Carré[21] pour s’en convaincre : on apprend avec les autres, mais toujours seul. Par ailleurs, à côté des RSMA, qui restent, j’en conviens, largement à définir, et à qui les moocs sont ce qu’homo-erectus est à Sapiens, d’autres modalités formatives, y compris plus traditionnelles[22] continueront d’exister. Enfin, si la socialisation présente de nombreux points positifs pour l’apprentissage, l’apprenant ne peut jamais être réduit à sa manifestation sociale qui ne constitue qu’un de ses avatars supportable par les tiers. Or, comme nous l’a démontré Edgar Morin, Sapiens est aussi Demens…[23]

Ces quelques propositions sont loin d’épuiser le sujet et c’est avec plaisir que je vous invite à en débattre afin de défricher les chemins à parcourir entre l’enseignement massif non accompagné et l’accompagnement massif en trompe l’oeil


[1] L’essentiel du contenu de cette loi est présenté par Jean-Pierre Willems dans cette vidéohttps://www.youtube.com/watch?v=yTM2c3cZJ8M. Les décrets d’application de la loi sont à paraître.
[3] Selon le magazine Maddyness, 60% des métiers qui façonneront l’avenir n’ont pas encore été inventés http://www.maddyness.com/emplois/2014/01/28/60-des-metiers-nont-pas-encore-ete-inventes/
[4] Parmi les nombreux ouvrages consacrés aux groupes : Anzieu, Didier (2013). La dynamique des groupes restreints. 13e édition, 1ère édition en 1968. PUF. Moscovici, Serge (1988). Psychologie des minorités actives. PUF. Landry, Simone (2007). Travail, affection et pouvoir dans les groupes restreints. PUQ. Mucchielli, Roger (2013). La dynamique des groupes. ESF
[6] Berne, Eric (2005). Structure et dynamique des organisations et des groupes. AT Editions
[8] Le concept de personal branding (marque personnelle) repose sur l’idée d’appliquer à une personne connue ou non (professionnel en général : artiste, salarié, manager, responsable d’entreprise) les techniques de communication utilisées pour les marques. Ceci est largement facilité par les outisl du web 2.0. Article de Wikipédia http://fr.wikipedia.org/wiki/Marque_personnelle
[9] Sur les notions d’individualisation et de personnalisation cf. Rodet, Jacques (2014). Le tutorat, élément de la flexibilité d’une FOAD. Revue Tutorales, n°13, pp. 7-15http://www.jrodet.fr/tad/tutorales/tutorales13.pdf
[10] Rodet, Jacques (2010). Propositions pour l’ingénierie tutorale. Revue Tutorales n°7, pp. 6-21http://jacques.rodet.free.fr/tutoral7.pdf
[11] C’était également la première préconisation des quatre que j’ai formulé lors des JEL 2013 à propos du tutorat dans les moocs. Les trois autres étant : Utiliser la période d’inscription pour analyser les besoins d’aide des apprenants ; Former les animateurs des moocs aux fonctions tutorales ; Procéder à des enquêtes auprès des apprenants sur les services tutoraux dont ils bénéficient et les associer à leur amélioration. Diaporama http://jacques.rodet.free.fr/jel2013.pdf
[12] Rodet, Jacques (2012) Des fonctions et des plans de support à l’apprentissage à investir par les tuteurs à distance. http://blogdetad.blogspot.fr/2012/06/des-fonctions-et-des-plans-de-support.html
[13] Sur la variété des profils tutoraux cf. Vacaresse, Sylvain (2013) Retour sur un système tutoral à l’université https://www.youtube.com/watch?v=2OU3E8X7dAY
[14] Rodet, Jacques (2011). Formes et modalités de l’aide apportée par le tuteur in Le tutorat à distance, sous la direction de Christian Depover. pp.159-170. De Boeck
[15] Rodet, Jacques (2010). Op. déjà cité.
[16] « La théorie de l’acceptabilité propose d’étendre le traditionnel modèle de « la conception centrée sur l’utilisateur » en partant de questions concernant l’évaluation de l’interface par l’utilisateur pour aller jusqu’à des prédictions de l’usage envisagé. ». Février, Florence (2011). Vers un modèle intégrateur « expérience-acceptation » Rôle des affects et de caractéristiques personnelles et contextuelles dans la détermination des intentions d’usage d’un environnement numérique de travail. Thèse de doctorat. http://halshs.archives-ouvertes.fr/docs/00/60/83/35/PDF/theseFevrier.pdf
[17]Cf. https://sites.google.com/site/jacquesrodet/Home/essai/tutoratetmoocs. Cette typologie a également fait l’objet d’une présentation aux JEL 2013, cf. note 11.
[18] Pihel, Laetitia. Le don/contre-don de Marcel Mauss, un paradigme pour et au service de la GRH.http://centremagellan.univ-lyon3.fr/fr/articles/305_620.pdf « Mauss (1923-1924) définit l’échange de type don/contre-don à partir de quatre dimensions. Selon l’auteur, il comprend à la fois, une dimension intéressée (lutte d’honneur, intérêts économiques, etc.) et désintéressée : les acteurs sont conduits à se dessaisir, à sacrifier leurs intérêts immédiats au nom du lien. Il inclut également une dimension contrainte (ou obligée) : car des obligations de toutes sortes pèsent sur la relation, et une dimension libre et spontanée : chacun décide du moment où il donne et de l’initiative du pas fait vers l’autre. »
[19] Ceci est à mettre en lien avec les propos d’Amandine Brugière qui, à propos des mutations du travail, indique « Peut-être est-ce alors moins le travail qui est en crise que la reconnaissance (symbolique et financière) d’une production de valeur, beaucoup plus fortement attachée à l’individu et à son capital “cognitif”. Le travail devient ainsi de plus en plus “vivant”, comme le souligne Toni Négri. Son efficacité repose sur la capacité d’apprentissage, d’innovation, d’adaptation, de singularisation des individus. » http://www.internetactu.net/2014/06/27/la-metamorphose-du-travail/
[20] Pour découvrir xAPI http://fr.slideshare.net/fffod/x-api-20140225. Sébastien Fraysse est un des acteurs qui travaille à déterminer, à partir des usages que les acteurs souhaitent en avoir, les nouvelles formes de traçage des activités en ligne. http://www.elearning-standard.com/fr/tag/xapi/
[21] Philippe Carré a eu cette heureuse formule « on apprend toujours seul, mais jamais sans les autres »
[22] Le compagnonnage est une de ces modalités formatives qui traverse les époques sans perdre de sa pertinence.
[23] « Le terme sapiens/demens signifie, non seulement relation instable, complémentaire, concurrente et antagoniste entre la « sagesse » (régulation) et la « folie » (dérèglement), il signifie qu’il y a sagesse dans la folie et folie dans la sagesse. » http://www.intelligence-complexite.org/fr/documents/dictionnaire-de-citations.html?

Parution du n°12 de Tutorales

vignettetutorales12
Ce numéro comprend 10 textes des auteurs suivants : Lucie Audet et Michel Richer, Brigitte Denis, Pierre Gagné, Viviane Glikman, Geneviève Jacquinot, Jean-Paul Moiraud, Cathia Papi, Sylvie Pelletier, Jacques Rodet. Ils reflètent les conférences qu’ils ont données lors du séminaire en ligne marquant les 10 ans de t@d qui s’est tenu à l’automne 2013.

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A propos de la classe inversée : quelques réflexions sur la nature de l’inversion

La classe inversée fait de plus en plus parler d’elle. L’audience de Marcel Lebrun, qui en présente les principes dans ses conférences et qui la pratique, notamment au sein d’elearn2, est réelle et touche des cercles de plus en plus larges d’acteurs de l’éducation et de la formation. Je ne ferai donc pas une présentation détaillée de la classe inversée (cf. le billet de Marcel Lebrun « Classes inversées, Flipped Classrooms … Ca flippe quoi au juste ? ») mais formulerai quelques réflexions tant il est toujours nécessaire, en particulier dans le domaine de la formation, de questionner les formules pédagogiques qui apparaissent, à un instant t, comme la solution à toutes les insuffisances des dispositifs de formation. A cet égard, Adrien Ferro, dans un commentaire à un post sur Facebook, note « Le problème de la classe inversée est que les préliminaires au présentiel sont totalement dépendants des variables locales, familiales notamment. C’est justement pour éviter ceci que l’école existe. »

Hybridation plutôt qu’inversion ?

Le principe cardinal de la classe inversée est de confronter les apprenants à l’enseignement, au discours du formateur, aux aspects conceptuels ou notionnels en situation distancielle, à partir de ressources. Il s’agit donc pour les apprenants d’effectuer en autonomie une prise d’informations (ce qui sous-tend un étayage-désétayage progressif selon les caractéristiques propres à chaque apprenant). En situation classique de formation, cette étape correspond le plus souvent à l’exposé, au cours magistral. Dans un deuxième temps, la situation présentielle est dédiée, en présence du formateur, à la remédiation et à la manipulation des informations recueillies par les apprenants afin qu’ils les transforment en savoir, savoir-faire et savoir-être. Le travail collaboratif autour de situations authentiques étant la pratique d’inspiration socio-constructiviste la plus utilisée.

Dans ce scénario, on peut remarquer que la séquence déductive traditionnelle théorie puis pratique  n’est pas inversée comme cela peut être le cas dans la formule de la formation-action, de nature inductive, où les apports théoriques n’interviennent qu’au moment où ils s’avèrent nécessaires et que pour servir les finalités de l’action, (sur la formation-action). La classe inversée n’inverse donc pas automatiquement le processus cognitif qui peut rester d’ordre déductif.

Dans les expériences de classes inversées les plus abouties, un troisième temps, qui peut être aménagé tant en présentiel qu’à distance, vise à faciliter la conscientisation, par les apprenants, de leurs acquisitions et du processus qui les a permises. Cette étape d’ordre métacognitif, bien que toujours possible, est rarement aménagée dans une démarche pédagogique classique ou académique. Elle présente une haute valeur ajoutée mais elle n’est pas une caractéristique spécifique de la classe inversée.

L’inversion en classe inversée peut donc sembler correspondre davantage à une hybridation des temps de formation où les concepts sont étudiés à distance et la mise en pratique réalisée en présentiel. Il est toutefois remarquable qu’elle peut se situer, selon les intentions des concepteurs dans plusieurs scénarios de latypologie Competice et dans la plupart des types de la typologie Hysup. Il apparait donc que l’hybridation des temps présentiel et distanciel ne suffit pas à la décrire et que les postures des acteurs et l’approche pédagogique structurant les différentes étapes du scénario de la classe inversée soient autant d’éléments à prendre en compte pour la caractériser.

Enseigner moins pour qu’ils apprennent plus

Selon John Dewey, moins il y a d’enseignement, plus il y a d’apprentissage. Dans la lignée des approches constructivistes dont les principes généraux sont le développement de perspectives multiples, la négociation du sens, la contextualisation, la collaboration, il me semble que l’inversion est liée au poid relatif donné d’une part, aux activités d’enseignement et d’autre part à celles d’apprentissage.

Dès lors, il étonnera peu que je relie le changement de posture du formateur ou de l’enseignant à l’effectivité de l’inversion. Ne plus se focaliser sur la seule transmission, même médiatisée, mais au contraire accorder une importance plus grande au soutien à l’apprentissage, à l’accompagnement, à l’aide tutorale, tel me semble l’enjeu principal de l’inversion. Ce rapprochement entre la posture tutorale en formation à distance et le rôle de l’accompagnement dans les classes inversées a été exploré par Marcel Lebrun lors de la conférence données dans le cadre du séminaire des 10 ans de t@d : « Classes inversées : quand le tutorat à distance inspire l’accompagnement en présence »

A l’issue de cette conférence, les conclusions que Marcel Lebrun a rassemblé sous le titre « Les Flipped Classrooms, un nouveau métier pour les … enseignants » étaient les suivantes :

  1. Mieux utiliser les espaces (mobilité, présence-distance) et les temps (flexibilité, synchrone-asynchrone) de l’enseigner et de l’apprendre (flipper l’espace-temps)
  2. Proposer une formation plus individualisée et davantage en résonance avec les rythmes, les styles et les activités de chacun (flipper surface-profondeur, sérialisme-holistisme)
  3. Mieux balancer la nécessaire transmission des savoirs et le développement des savoir-faire et savoir-être, des compétences et de l’apprendre à apprendre (flipper les savoirs et les taxonomies)
  4. Apprendre à mettre de l’ordre dans des structures désordonnées (flipper cartes et boussoles, ordre et désordre)
  5. Rendre les étudiants davantage actifs et interactifs, plus impliqués (flipper transmission et appropriation)
  6. Répondre à des questions que les étudiants se posent plutôt que de répondre à des questions qu’ils ne se posent pas (flipper les rôles)
  7. Pour les enseignants, leur permettre une appropriation (un développement professionnel) progressive … nul besoin de tout « flipper » en une fois

Je ne suis pas pleinement convaincu qu’il s’agisse d’un nouveau métier (cf. la conférence de Viviane Glikman « Peut-on parler du « métier » de tuteur à distance ? »), plus probablement comme l’indique en creux la conclusion 7 de Marcel Lebrun, d’une évolution progressive, certes, mais nécessaire. Il serait d’ailleurs plus juste de parler d’évolutions au pluriel tant la mise à distance de la formation, même partielle comme dans le cas de la classe inversée, redistribue les cartes, les rôles, les fonctions.

L’éclatement de la fonction d’enseignant
lors de la mise à distance de la formation

 formateur

Aussi, les conclusions de Marcel Lebrun n’impactent pas le seul enseignant, à moins de le considérer comme « seul maitre à bord » ce qui serait contradictoire avec l’esprit même de la classe inversée.

« Flipper l’espace-temps » est une question d’ingénierie pédagogique et concerne donc le concepteur, organisateur et scénariste qui n’est pas forcément le formateur-animateur-tuteur.

« Flipper surface-profondeur, sérialisme-holistisme » relève de l’individualisation qui est également une question d’ingénierie pédagogique (cf. mon billet « L’individualisation, élément de la flexibilité d’une FOAD ») et de personnalisation. J’en donne la définition suivante : « La personnalisation, en formation, désigne le processus relationnel qui va permettre à l’apprenant de voir pris en compte ses caractéristiques personnelles au cours de sa formation. Elle induit l’établissement d’une « relation privée » entre le tuteur et un apprenant. » (cf. mon billet « Le tutorat, élément de la flexibilité de la FOAD »). Elle concerne donc les animateurs, tuteurs et évaluateurs.

« Flipper les savoirs et les taxonomies » est tout à la fois une question épistémique et de construction du discours didactique qui devrait être structuré autour du développement de perspectives multiples. Cela concerne le concepteur et le producteur.

« Flipper cartes et boussoles, ordre et désordre » renvoie à l’ingénierie pédagogique d’une part mais aussi et surtout à l’accompagnement tutoral. Cela concerne donc prioritairement les animateurs, tuteurs et évaluateurs.

« Flipper transmission et appropriation » et « Flipper les rôles » relèvent du choix de l’approche pédagogique qui à mon sens ne peut être de la seule responsabilité du formateur mais du partage de celle-ci avec l’institution et les apprenants.

La classe inversée se révèle être une pratique riche et prometteuse. D’une part, car elle provoque un écho auprès d’un nombre de plus en plus grand de formateurs et d’enseignants et d’autre part, parce qu’elle pose la question centrale de la distribution des rôles entre les professionnels de l’éducation et de la formation et les apprenants. Elle acculture à la mise à distance de la formation qui pour de nombreuses raisons est une réalité incontournable du paysage de la formation tant initiale que professionnelle. Elle vient aussi bousculer les modèles de FOAD, s’invite dans les moocs.  Au terme de ce billet, plusieurs questions restent ouvertes. Une classe inversée basée sur la modèle déductif peut-elle réellement tenir toutes les promesses de l’inversion ? L’hybridation de la classe inversée et de la formation-action n’est-elle pas souhaitable ? La mise en place de classes inversées où les temps présentiel et distanciels sont mixés n’amène-t-elle pas à devoir la penser plus comme un projet à co-construire par une équipe techno-pédagogique plutôt que comme une offre élaborée par un seul enseignant ou  formateur ?

Pour un usage réfléchi des neurosciences en pédagogie

Ce billet est en écho aux billets de Dominique Gros sur ce site et suite à un commentaire d’un de mes contacts sur Google Plus que je reproduis ici :

« une légère peur de voir que les neurosciences renforcent la pédagogie de notre « ancien temps », des instituteurs et du béhaviorisme…  N’y a-t-il pas eu des théories constructivistes et socio-constructivistes : comment se retrouvent-elles dans les neurosciences ? je m’interroge… »

cerveauUne compréhension de la neuroscience qui s’arrêterait à identifier des comportements, à les taxonomier, à catégoriser les individus et à automatiser-industrialiser leurs formations en fonction de ces éléments risquerait de réactiver les modèles pédagogiques anciens (académique, béhaviorisme) dont on connait les nombreuses limites.

Dès lors qu’on se servirait des neurosciences pour évacuer la relation humaine, indispensable à la formation, on s’exposerait aux plus graves dérives.

Les apports des neurosciences sont par contre utiles pour mieux comprendre comment entrer en relation avec les apprenants dès lors que l’on ne cherche pas à tout prix à les réduire età les maintenir dans des catégories cognitives.

Savoir, par exemple, que certains apprenants ont une préférence cognitive procédurale et qu’ils ont besoin, non seulement d’un cadre mais de la transmission d’une marche à suivre précise pour réaliser leurs tâches, que certains autres, s’épanouissant dans la (sur)socialisation risquent de beaucoup solliciter leurs formateurs et tuteurs, que d’autres ne peuvent conceptualiser qu’à partir du vécu d’une situation authentique, de d’autres au contraire ont besoin de maitriser la théorie pour s’autoriser à agir, etc. Cette connaissance est utile pour mieux entrer en relation.

C’est au niveau de l’individualisation que les apports des neurosciences peuvent être les plus féconds. Les différents profils peuvent être pris en compte lors de la conception de la formation afin d’individualiser le parcours. L’individualisation étant bien une question d’ingénierie pédagogique.

Mais l’individualisation ne suffit pas. La personnalisation est la prise en compte des caractéristiques de l’individu qui ne sont pas réductibles à une catégorie. C’est bien dans la relation, et uniquement dans la relation, en particulier tutorale, que la personnalisation est possible. Il y faut toute l’intelligence sociale des êtres humains, leur volonté d’engagement dans la relation à l’autre, leur capacité à l’empathie pour que la personnalisation soit effective. Il y faut aussi des moyens matériels et financiers car la relation c’est du temps, et le temps, c’est de l’argent 😉

Comme toujours en pédagogie, il n’y a pas une réponse et les neurosciences ne sont pas LA réponse mais ses apports, contextualisés aux besoins des apprenants et aux intentions pédagogiques, peuvent permettre d’enrichir nos approches et pratiques.

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Sur la personnalisation, cf. mon intervention à Intertice cette année  » Le tutorat au service de la personnalisation des apprentissages » : diaporama – vidéo

Les badges, promoteurs de compétences ?

Vous vous en êtes certainement rendu compte ces temps-ci, les badges sont revenus à la mode. La où dans les années 70′ ils étaient porteurs de revendications, dans les années 80’ signaient son appartenance à tel ou tel groupe, les badges du XXIe siècle sont numériques et ont pour prétention de montrer les compétences que l’on possède. C’est particulièrement le cas dans les moocs qui cherchent à donner, le plus souvent contre rétribution (cf. badges du mooc ITyPA) un succédané de diplôme.

Le plus amusant est que certains de ces badges payants n’attestent que de sa participation à une formation : actualisation habile et mercantile de l’attestation…

brejnevJe ne fais que peu de différence entre les médailles, les diplômes et les badges. Il s’agit bien de la même logique : montrer par un signe symbolique ses mérites, son savoir ou ses compétences. Je trouve les premières prétentieuses et pas loin du ridicule comme dans le cas de l’illustration de ce billet, les deuxièmes sont de plus en plus surannés bien que trop souvent des passages obligés, les troisièmes sont une trouvaille revendiquée plus moderne que les diplômes mais n’évitant pas leur travers.

Le problème pour les trois, c’est qu’ils sont des affirmations censées doter leur possesseur de l’aura symbolique que les uns et les autres veulent bien leur accorder. Tout comme un CV, qui n’est qu’une somme de déclarations, ces signes de reconnaissance n’apportent pas les preuves ni de son savoir ni de ses compétences. Ce qui m’importe ce ne sont pas les signes mais les preuves qui ne peuvent être apportée que par l’action.

Vouloir documenter ces compétences est légitime, mais la meilleure manière n’est donc pas de se médailler, de se diplômer ou de se badger. Il s’agit, bien au contraire, par la réalisation d’actions et la communication produite sur ses actions de démontrer à ses interlocuteurs que l’on possède tel savoir, savoir-faire ou savoir-être.

J’ai été en situation de recruter de nombreuses personnes pendant une dizaine d’années. Je me suis toujours d’abord fié aux réalisations que me présentaient les candidats, et sur lesquelles je ne manquais pas de les interroger longuement, plutôt que sur leurs titres. En ce sens le portfolio est un progrès (surtout s’il comporte une partie autoréflexive) mais pas si nouveau que cela… les graphistes, par exemple, présentent leurs books depuis très longtemps (là pas d’autoréflexivité). Le portfolio, tout comme le book ne prouvent rien. Ils peuvent être hightech, impressionnants par leur volume et les travaux contenus, parsemé de références prestigieuses mais au final ce ne sont que de belles images. C’est le commentaire que le possesseur du portfolio peut en faire qui permet à son interlocuteur de nourrir son intime conviction qu’il a affaire à quelqu’un qui sait de quoi il parle et qu’il est vraiment l’auteur des travaux présentés. C’est la mise en situation de production de l’individu qui apporte les preuves définitives de ses déclarations.

Se badger c’est en quelque sorte se complaire, à l’instar des décorés de tout poil, dans son statut d’ancien ; d’ancien  apprenant et non de professionnel agissant et apprenant de ses actions.

« On n’a jamais fini de faire ce tri là, entre ce que vont m’apporter mes maîtres, mes collègues,
mes élèves, mes patients et ce que je suis, moi, et ce que je pense. »
Max Pagès.

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Qui sont les apprenants des moocs ?

Isabelle Quentin, Docteure en sciences de l’éducation – PHD in Education – Agrégée en économie gestion, a publié une « Revue de la littérature nord américaine sur les apprenants de MOOCs »

Elle écrit : « Les MOOCs (Massive Open Online Course) ont connu en 2012 un développement sans précédent. Gratuits et ouverts, ils permettent à tous d’accéder à la connaissance. Ces nouveaux dispositifs d’éducation en ligne proposent l’accès à des cours sous la forme de capsules vidéo ainsi qu’à des QCM. Ils incitent les apprenants à réaliser des exercices ou des projets qui sont évalués soit par leurs pairs, soit de manière automatique. Les apprenants ont la possibilité d’interagir entre eux grâce à un ensemble d’outils comme des blogs, des forums ou des groupes créés sur des réseaux sociaux. Plusieurs auteurs s’accordent sur le fait que certaines caractéristiques spécifiques des MOOCS bousculent les modèles traditionnels des formations en ligne (Mackness & al. 2010 ; Cisel & Bruillard 2013 ; Baron 2012 ; Stepan, 2013)… »

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La carte et le territoire des tuteurs à distance. Propositions pour un cadastre tutoral.

Lors de sa récente conférence sur les espaces du tutorat à distance, Jean-Paul Moiraud a évoqué la nécessité pour les tuteurs à distance de cadastrer leurs zones d’intervention auprès des apprenants.
Pour mieux cerner ce que serait le cadastre tutoral, rappelons dans un premier temps que ce terme nous vient « du latin capitastrum, un registre de capitation, et du grec κατάστιχον katastikhon, une liste d’enregistrements, de κατὰ στίχον kata stikhon – littéralement, « ligne par ligne » avec les directions et distances entre les angles mentionnés et marqués par les monuments et les bornes. » Source Wikipédia. Un cadastre est un ensemble de cartes rassemblées par un organisme public qui est consultable par chacun (cf. le cadastre national de la France)
En formulant cette proposition, Jean-Paul Moiraud soulignait en quelque sorte que naviguer dans un territoire sans en posséder la carte n’offre que la possibilité de la sérendipité. Si celle-ci est souvent l’occasion de belles découvertes et rencontres inopinées, elle ne peut servir de viatique au tuteur dont les fonctions sont balisées par l’institution, parfois formalisées, et c’est souhaitable, dans une charte tutorale. La carte permet de se diriger sur le territoire, ce qui n’est pas rien, mais elle présente aussi l’avantage d’être révélatrice, par la forme qui lui est donnée, de la représentation qu’ont ses auteurs des espaces d’interactions avec les apprenants. C’est pourquoi, plutôt que de fournir la « carte Michelin des tuteurs », l’institution aurait intérêt à ce que les tuteurs la co-construisent de manière collaborative. Ceci permettrait l’émergence d’une vision commune des espaces à investir.
Une carte c’est tout d’abord une échelle dont la grandeur autorise le niveau de précision des indications qu’elle comporte. Une carte est composée de lignes, de couleurs, de texte, d’icônes. Il est donc nécessaire pour bien l’utiliser d’en avoir défini la légende.
Les espaces, réels et virtuels, d’intervention des tuteurs sont multiples et le passage de l’un à l’autre est davantage marqué par la fluidité que la porosité nous a dit Jean-Paul Moiraud. Aussi, les distances géographiques entre ces espaces sont une base d’interprétation peu valide. L’échelle de la carte tutorale ne semble donc pas être une notion pertinente pour la dessiner. Plus intéressant serait de prendre en compte les autres dimensions de la distance que sont le temps, la technologie, le rapport psychosocial, les aspects économiques et pour tout dire la distance pédagogique.
La carte tutorale comporterait ainsi plusieurs calques pour chacune de ses dimensions de la distance. Les informations de chacun de ses calques seraient dans une couleur donnée afin de permettre une mise à plat lisible de l’ensemble.
Je ne détaillerai pas ici, l’ensemble de ces calques mais prendrai l’exemple du calque technologique. Les outils de communication utilisés par les tuteurs pour intervenir auprès des apprenants sont innombrables. En effet, tout outil de communication est potentiellement utilisable pour supporter des interventions tutorales. C’est pourquoi il est nécessaire de préciser les critères qui permettent d’en faire le choix, que ces outils soient prescrits, acceptés ou proscrits par l’institution. Chacun de ses critères pourrait faire l’objet d’une icône et d’un indice sur la carte. Ci-dessous la liste que je propose :
  • L’accès matériel : est-ce que l’outil peut être utilisé dans l’environnement des acteurs ?
  • L’accès fonctionnel : est-ce que les tuteurs et les apprenants maitrisent l’outil ? Quel est le coût cognitif de la maitrise fonctionnelle ?
  • L’accès économique : quel est le coût d’acquisition ou d’utilisation ?
  • Les caractéristiques d’usage : de rare à répandu, de simple à complexe
  • La forme communicationnelle : écrite, orale, visuelle, synchrone, asynchrone
  • Le type de communication supportée : unidirectionnelle, bidiretionnelle, multidirectionnelle
  • La durée de disponibilité de l’information transmise : transitoire, courte, longue, permanente, répétable
  • L’urgence de la communication : la modalité synchrone étant privilégiée en cas de grande urgence
Au terme de ce court billet, il apparait que les éléments des autres calques restent à définir et que l’idéal pour avancer serait de réaliser ce travail cartographique avec une équipe de tuteurs intervenant dans un même dispositif. Cela permettrait de mettre en œuvre la vision partagée de leur territoire et de donner à d’autres tuteurs une base de départ pour construire leur propre carte. Ce serait le premier pas vers ce que pourrait être à terme un cadastre tutoral qui rassemblerait un ensemble de cartes tutorales de différents dispositifs.
Initialement publié sur le Blog de t@d le 2/11/13

Défauts de jeunesse des moocs et propositions pour leur accès à la maturité

« L’imagination c’est de la mémoire fermentée.
Quand on perd la mémoire on perd sa faculté d’imaginer. »
Antonio Lobo Antunes

bébé

N’en déplaise aux encenseurs des moocs parant ces dispositifs de toutes les vertus, revendiquant la paternité d’une révolution de la formation et de l’éducation, ces dispositifs, qu’ils soient instructionnistes ou connectivistes présentent des défauts qui ne sont pas sans lien avec l’ignorance des différentes formes de formation à distance qui les ont précédés et qui, aujourd’hui, coexistent avec eux.

Pas de grand soir

La révolution proclamée est soit une large imposture soit la marque d’un manque de mémoire voire de l’ignorance. Pour ceux qui douteraient de cette affirmation, je ne saurais trop conseiller, en préambule, de visionner la conférence de Thierry Karsenti « Mooc : révolution ou simple effet de mode ? »

L’imposture est opportune aux nouveaux entrants. Elle leur permet d’apparaitre comme des inventeurs, de gagner à bon compte en image de marque et en part de marché. Avant eux, c’était l’archaïsme et sans eux il n’y aurait point de salut. Ils se présentent volontiers comme des bousculeurs, et il est bien nécessaire d’être bousculé régulièrement. Ils bousculent, mais en partie seulement car pour parvenir à leurs fins les bousculeurs, les révolutionnaires, affichent clairement leurs buts. Or, il est remarquable que les principaux initiateurs de moocs soient peu loquaces sur les leurs. S’agit-il d’abolir l’institution universitaire ? Ce serait bien étonnant puisqu’ils en sont issus et qu’ils en vivent. S’agit-il de trouver un nouveau modèle économique pour les universités ? La faiblesse des analyses sur ce point permet à certains de reconnaitre leur doxa économique dans la métaphore de « la ruée vers l’or ». S’agit-il de mettre l’accent sur la validation des savoir-faire plus que des connaissances ? Le remplacement des diplômes par les badges (payants) est une réponse un peu courte pour transformer les universités en nouveaux constructeurs de compétences, somme de savoir, de savoir-faire et de savoir-être. S’agit-il de réduire l’échec à l’université ? L’absence de stratégie en faveur de la réussite pour tous qui prévaut dans les moocs démontre le contraire.

Certains buts semblent effectivement peu avouables : sélectionner les étudiants, attirer les cerveaux, gagner en influence et marginaliser les autres acteurs considérés comme concurrents, favoriser quelques enseignants au détriment des autres… le but ultime étant de rentabiliser l’activité éducative.

Quels seraient donc des buts utiles et qui pourraient être revendiqués, sans honte, par les moocs ? Deux exemples.

  • Les besoins de formation sont massifs et s’internationalisent. Les universités dans leur forme actuelle ne sont pas en mesure de répondre positivement à l’ensemble de ces besoins. Il faut donc trouver d’autres formules permettant de rejoindre les apprenants potentiels. La mise à distance des parcours de formation constitue une réponse possible et certainement incontournable, mais elle a besoin davantage de coopération entre les institutions que de concurrence débridée, de politiques coordonnées nationalement et internationalement que d’initiatives égotiques.
  • L’échec universitaire en première année est massif. Les universités dans leur forme actuelle n’ont pas trouvé, su mettre en place, des stratégies efficaces pour lutter contre cet échec. Il est reconnu que l’échec des étudiants tient à leur manque de préparation méthodologique aux études supérieures, à des lacunes dans l’exercice de leur autonomie et souvent à un manque de connaissances prérequises. Il pourrait donc être utile d’initier des moocs préparant les futurs étudiants à rassembler ces conditions nécessaires à leur réussite. Les besoins en la matière étant transversaux aux universités, leur collaboration permettrait d’atteindre la masse critique nécessaire aux investissements dans un mooc. Cela nécessiterait aussi que les initiateurs des moocs, bien loin des pratiques actuelles, s’intéressent aux étudiants en difficulté et non à ceux qui réussissent indépendamment des dispositifs dans lesquels ils évoluent.

Sans mémoire

Ce qui est surprenant, voire troublant et, avouons-le, parfois un peu rageant, c’est de constater que les initiateurs des moocs, ignorent presque tout, du moins ne se réfèrent pas à l’histoire, plus que centenaire, de la formation à distance. Pourtant, une des promesses initiales de celle-ci était bien de faciliter l’accès au savoir au plus grand nombre. L’ancêtre du CNED a été créé pour assurer la continuité du service public de l’éducation alors que de nombreux élèves étaient en exode lors de la seconde guerre mondiale. L’Open University de Grande Bretagne, mis en place en 1969, l’a été pour tourner le dos à l’élitisme du système universitaire britannique. La formation de plusieurs milliers d’étudiants à distance par la Télé-université du Québec, chaque année depuis plus de trente ans, a pourtant doté cette institution d’une réelle expertise pour rejoindre des publics éloignés. Depuis une dizaine d’années, les licences et masters en FOAD offerts par de nombreuses universités permettent à des étudiants éloignés de se former.

Un intérêt plus soutenu pour ces pratiques passées et actuelles permettraient au initiateurs des moocs de ne pas reproduire certaines erreurs. La plus importante de celles-ci étant de renvoyer l’apprenant à lui-même ou aux seuls échanges avec ses pairs en ne concevant et ne diffusant pas de réels services tutoraux.

Besoin de temps

Ce qui précède attire davantage l’attention sur les aspects inaboutis des moocs que sur leurs potentialités. Cela paraîtra peut-être injuste aux plus convaincus des moocs. Pour ma part, je suis persuadé que les insuffisances des moocs sont redevables à leur jeunesse et à leur prétention à la révolution faisant table rase de ce qui les a précédés.

L’histoire récente du e-learning a montré que les effets de mode, même en éducation, passent. Les normes étaient un sujet incontournable de tout prosateur ou conférencier du e-learning au début des années 2000. De nombreuses questions et orientations en la matière restent pourtant pendantes mais c’est passé de mode. Il y a trois ans, ne pas promouvoir les serious-games était presque une faute professionnelle, du moins le signe tangible de son inadaptation au temps numérique. Si aujourd’hui des serious-games sont développés, ils ont été éjectés de l’actualité. Qu’en sera-t-il des moocs dans deux ans ?

Il faut donc du temps pour y voir plus clair mais également pour que les moocs arrivent à maturité. Pour ce faire, le temps ne suffira pas. Il est indispensable que les initiateurs de moocs, au-delà des retours d’expériences qui ont tous les atours d’une promotion médiatique tous azimuts, engagent une réelle réflexion en s’ouvrant au dialogue avec leurs prédécesseurs en formation à distance et à l’altérité du monde éducatif.

A minima, plusieurs actions me semblent devoir être réalisées de manière prioritaire par les acteurs des moocs :

  • Abandonner la prétention de la révolution
  • Tirer les lecons de l’histoire de la formation à distance
  • Affirmer des valeurs et des buts positifs en substituant la collaboration à la compétition
  • Identifier sa plus-value sociétale
  • Enoncer son modèle économique
  • Trouver des solutions pour lutter contre l’abandon massif
  • Prendre en compte tous les aspects, et non pas seulement la gratuité, qui rendent accessibles une formation
  • Considérer les moocs comme une modalité à associer à d’autres au sein des dispositifs de formation

L’école des Annales au XXe siècle a profondément renouvelé la pensée et la pratique historique. Elle a mis l’accent sur les permanences au détriment des ruptures que constituent les événements. Elle a montré que l’écume de ceux-ci avait moins d’impact sur l’évolution sociétale que la manière dont les permanences se réactualisent au fil des époques. C’est pourtant Jacques Le Goff, figure des Annales, qui a produit un admirable « Saint Louis » en renouvelant profondément la pratique de la biographie, genre honni du mouvement des Annales.

C’est parce que les moocs ne sont pas sans histoire qu’ils ont peut-être un avenir.

Initialement publié sur mon site le 1/11/13
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