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Catégorie : Stratégie e-Learning

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Manager le changement du métier de formateur

Dans un précédent article, j’ai abordé la question du changement du métier de formateur en me focalisant surtout sur les outils. Ici, je m’intéresserai surtout au management du changement.

Selon le modèle des Niveaux neuro-logiques de Robert Dilts, inspiré des travaux de Gregory Bateson, la vie des personnes dans n’importe quel système et d’ailleurs la vie du système lui-même peut être décrite et comprise à partir d’un nombre différents de niveaux :

  • L’environnement
  • Les comportements
  • Les capacités
  • Les valeurs et croyances
  •  L’identité profonde

C’est un modèle qui décrit comment on peut aborder le changement et qui permet d’identifier où se trouvent les difficultés qui peuvent empêcher l’atteinte des objectifs.

Le niveau de l’Environnement

L’environnement c’est par exemple le contexte au sein duquel les membres d’une organisation interagissent, c’est-à-dire Où et Quand se passent les opérations et les relations au sein de l’organisation.

Le niveau des Comportements

Les comportements sont nos actions spécifiques pour mener au mieux notre travail. C’est ce que nous faisons concrètement, ce qui inclue la façon dont nous communiquons au sein de notre environnement. Ce sont aussi nos habitudes, nos routines. C’est le niveau du Quoi.

Le niveau des Capacités

A un premier niveau non visible par une personne extérieure, on retrouve les capacités mobilisées par une personne ou une organisation pour tenter d’atteindre ses objectifs, c’est-à-dire les stratégies choisies et également les ressources mobilisées pour pouvoir agir d’une certaine façon. C’est le niveau du Comment.

Le niveau des Croyances et des valeurs

L’accès à nos capacités est déterminé par nos croyances et nos valeurs.
C’est ici le niveau du Pourquoi.

Le niveau de l’Identité profonde

Nos valeurs et nos croyances sont le fruit du sens que nous avons de notre identité. Qui sommes-nous ? Comment est-ce que nous nous définissons? Quel est mon rôle dans mon organisation ? C’est ici le niveau du Qui.

Manager le changement implique d’agir progressivement en commençant par les couches les plus accessibles puis de remonter progressivement, surtout dans un contexte global non porteur d’innovation.

Dans le cadre de l’intégration des TIC et de l’introduction du e-learning dans les processus et dispositifs de formation d’un organisme de formation, cette progressivité implique non seulement de progresser par étapes mais également de favoriser une approche coopérative et expérimentale tout au long du cycle.

  • Le 1er niveau d’action est l’Environnement : c’est-à-dire apprendre à interagir sur un contexte rénové sans remettre en cause les processus. C’est à ce niveau qu’il est possible d’introduire une réflexion active sur les moteurs pouvant développer l’utilisation du e-learning. Par exemple, développer des actions de formations plus individualisées en réponse à des demandes tangibles du marché, ou bien développer une action de formation « métier » centrée sur l’amélioration de compétences en situation (pédagogie de projet).
  • Le 2ème niveau d’action touche les Comportements : c’est-à-dire apprendre à développer de nouvelles pratiques sans changer pour autant les processus. C’est à ce niveau qu’il est possible de développer  l’usage des TIC dans le travail du formateur pour en mesurer le bénéfice. Par exemple, utiliser des didacticiels dans une session en présentiel ou bien l’utilisation d’outils collaboratifs en post-formation : pour une évaluation réflexive des acquis en partageant une base collective de ressources.
  • Le 3ème niveau d’action concerne les Capacités : c’est-à-dire apprendre à développer de nouveaux processus en complément des anciens pour en améliorer l’efficacité globale. C’est à ce niveau qu’il est possible de construire des actions de « mix-learning » en association présentiel et formation à distance en amont ou en aval des processus existants. Par exemple, développer un dispositif de préparation et d’évaluation pré-formative pour une action de formation impliquant un public hétérogène.
  • Le 4ème niveau d’action mobilise les Croyances et des valeurs : c’est-à-dire apprendre à construire collectivement  une nouvelle perception du métier de formateur : moins transmetteur de savoirs qu’accompagnateur et médiateur de progrès individuels. C’est à ce niveau qu’il est possible de développer de nouveaux processus métier et de travailler réellement sur le développement de nouvelles compétences métier : tuteur, concepteur en particulier.
  • Le 5ème niveau d’action va interroger l’Identité profonde : c’est-à-dire apprendre à réévaluer « en situation » le sens du métier de formateur, au travers des premières expérimentations réalisées.  C’est à ce niveau qu’il doit être possible de travailler, en retour d’expérience, sur les perceptions et projets de chaque formateur pour les mettre en interaction avec un projet collectif à re-construire ou à rénover. Ce niveau est propice à la réflexion collective, plus qu’à l’action, préalablement au démarrage d’un nouveau cycle d’innovation.

Contenu e-learning pour support mobile : questions clés

La demande augmente pour le développement de contenu e-learning accessible sur smartphones et autres tablettes ?

 Quelques questions méritent d’être posées en amont de la phase de développement du contenu :

  •  Quel support mobile ciblez-vous ? Les tablettes, les smartphones ?
  •  Savez-vous comment sont équipés les apprenants ? Etes-vous dans un contexte qui vous permet d’axer le développement sur des cibles techniques définies ou bien vous adressez-vous à une communauté d’apprenants disposant d’un équipement multiple et hétérogène ? En fonction de la réponse à cette question, vous ciblerez le développement vers un nombre réduit de plateformes ou bien vous choisirez un mode de développement pouvant satisfaire un maximum de plateformes
  •  Quel type de contenu souhaitez-vous proposer ? Si vous souhaitez proposer du contenu partagé par exemple, vous ne pourrez pas cibler les smartphones. De plus, le contenu pour smartphones a avantage à être plus court
  •  Flash ou pas ? Même s’il existe quelques solutions techniques pour déployer du flash sur Iphone, le résultat est pour l’instant loin d’être optimisé. Ce facteur doit bien sûr entrer en ligne de compte dans votre réflexion. Les contenus Flash sont lisibles sur plateformes Android, mais avec des résultats variables, et peut-on seulement cibler les supports Android ? Peut être le meilleur choix consiste-t-il à choisir le HTML 5 ?

Avec la multiplication des supports et l’hétérogénéité de ces supports, il s’avère d’autant plus nécessaire de bien préparer la phase amont du développement de contenu, l’essentiel étant de bien connaître la cible technique, de bien choisir le contenu à déployer et les techniques à utiliser.

Développer le « e-learning » dans un OF : des outils pour une démarche réflexive

La question du développement d’un projet e-learning dans un Organisme de Formation est particulièrement stratégique car elle suppose une double démarche d’accompagnement en complète interaction.

Accompagner les changements des pratiques et une réflexion sur le métier du formateur:

Le processus d’accompagnement du changement doit être intégré dans toute la démarche de projet en travaillant sur les questions clés suivantes :

  • Pourquoi changer ? (en tant que formateur dans mes pratiques et mon métier, dans la représentation que j’ai de mon métier et de mon identité de formateur)
  • Si je ne change pas que peut-il se passer ?
  • Quel peut être mon futur et celui de ma structure ?
  • Si j’accepte de changer, sur quelques axes puis-je changer et avec quelles limites ? (compte tenu du contexte)

De manière classique, ces questions sont abordées dans un groupe de parole et dans une démarche de type « coaching ». En projet e-learning, ces questions sont récurrentes, elles doivent rester ouvertes tout au long de la démarche d’accompagnement et de développement car elles vont se cristalliser au fur et à mesure de l’avancement.

Intégrer la démarche dans un projet plus large de Knowledge Management 

La production collective d’un dispositif et de contenus e-learning associés suppose, en phase de conception de projet (cahier des charge et scénarios des dispositifs de formation e-Learning /mix-Learning) de travailler sur une dimension de :

  • Capitalisation des compétences, savoirs clé et ressources pédagogiques (quelle stratégie de partage ?)
  • Production et diffusion des connaissances (en particulier pour les stratégies de formation mobilisables, les ressources et modules médiatisés)
  • Centralisation et diffusion de l’information (en interface avec la plateforme e-learning)

Sans rentrer ici dans le détail des outils méthodologiques et de gestion du projet FOAD, qui pourra faire l’objet d’articles complémentaires, il paraît important de souligner l’importance particulière de l’outil de travail collaboratif qui va être utilisé (en grande partie à distance) tout au long du projet, dans le cadre de cette double démarche :

L’outil doit permettre une conduite de projet directive avec une forte dimension pédagogique

Il s’agit non seulement de développer un plan de travail non seulement dynamique (on doit pouvoir le compléter et le faire évoluer au fil de l’expérience) mais également interactif (on doit pouvoir y associer toute ressources utiles : lien vers une page démo, vers un document de travail, mais aussi vers le forum, tout particulièrement pour développer le volet « accompagnement du changement »
Ainsi la forme la plus adaptée pour un tel pilotage est un wiki en interaction avec tous les autres éléments partagés.

  • Chaque formateur, développant au fur et à mesure son projet de manière accompagnée, doit pouvoir éditer un carnet de bord correspondant à l’avancement de son travail et permettant d’y inscrire tout lien avec tout document ou ressource de projet en entrée ou en sortie. Outre sa forme de Wiki qui est préférable, il est essentiel de l’ergonomie soit très simple au niveau de son éditeur ou grâce à la possibilité d’insérer « à la volée » les liens pointant vers l’ensemble des ressources en entrée ou en sortie, créées au fur et à mesure dans la base partagée, pointant également vers le forum et les fils de discussion ouverts.
  • Le plan de travail du projet doit permettre non seulement de partager les ressources crées avec des droits très « granularisables » par utilisateur, au niveau de chaque outil (par exemple : la liste de tâches) et au niveau de chaque objet (dossier ou document par exemple). La notion de « granularisation » des droits est essentielle car elle permet de travailler en mode projet en affectant des tâches et des ressources au niveau de groupe de travail mais également au niveau d’individus (permettant une relation 1 pour 1) entre le tuteur-animateur de projet et le formateur impliqué dans la réflexion et le développement de sa réflexion et de ses outils.
  • Le troisième élément est bien sûr la possibilité de gérer tout type de document dans la base documentaire partagée puisqu’il s’agira de partager : des documents de guidance, des plans de travail et tous les documents résultants (scénarios de formation, scripts de contenus, maquettes et modules de formation médiatisés produits qui doivent être fonctionnels dans l’espace).

Mon expérience en tant que formateur et accompagnateur de projet e-learning en OF m’a amené à choisir et utiliser la plateforme de bureau virtuel ContactOffice, en mode SaaS (Software-as-a-Service) ou en mode Licence (serveur propre). Ses fonctionnalités et son ergonomie explique sa conformité au Schéma Directeur des Espaces numériques de Travail (SDET) du Ministère de l’Éducation français. (Voir http://www.contactoffice.com)

Bénéfices organisationnels de l’e-formation

Les pratiques intégrées de l’e-Formation (ou e-Learning) au sein des organisations professionnelles d’aujourd’hui se banalisent. En France, malgré un certain retard par rapport à d’autres pays européens, ce marché est en croissance (+15% entre 2008 et 2009 ; + 25% entre 2009 et 2010) et il le sera de plus en plus au cours des prochaines années (de 30% à 40% une étude du cabinet Féfaur).

Un des facteurs de croissance de ce marché est lié au contexte économique difficile auquel les organisations professionnelles sont confrontées. Les contraintes financières se faisant pressantes, les décideurs privilégient de plus en plus des solutions de formation à la fois flexibles, performantes et économiques.

C’est dans ce contexte financièrement tendu que les bénéfices les plus visibles de l’e-Formation s’expriment le plus clairement. En effet, il est communément admis que le premier niveau de bénéfices offerts par les solutions d’e-Formation professionnelles concerne les économies réalisables sur le budget de formation du personnel :

  •  Pas de frais de déplacement et d’hébergement des stagiaires ;
  • Economie de temps (et donc d’argent) attribuable à la durée globale de la formation (déplacement + hébergement + délivrance de la formation) ;
  • Supports et manuels de formation/auto-formation numérisés et centralisés (moins de frais d’impression, moins de frais de mises à jour, respect de l’environnement) ;
  • Economies d’échelles réalisables (un parcours d’e-Formation peut être diffusé massivement vers une audience dispersée géographiquement) ;
  • Diminution des besoins et frais de l’accompagnement (formateur présentiel > eTuteur distanciel) ;
  • Etc.

D’un point de vue financier, ces avantages paraissent évidement séduisants. Il est néanmoins nécessaire de les mettre en perspective avec le point de vue pédagogique lié aux ressources et modalités de l’e-Formation. La finalité organisationnelle étant bien sûr l’acquisition, par les personnes, de connaissances et de compétences utiles pour servir avec pertinence et performance des objectifs d’affaires stratégiquement définis…

Or, d’un point de vue pédagogique, toutes les solutions d’e-Formations ne se valent pas. Il faut donc bien préciser que les économies potentiellement réalisables grâce à l’e-Formation sont dépendantes d’une qualité pédagogique (incluant la qualité de l’accompagnement) au moins égale à celle qui serait proposée dans une modalité de formation professionnelle traditionnelle (stage de formation).

Généralement, lorsque la pertinence et la qualité pédagogique sont bien présentes dans une solution d’e-Formation, il est habituel de constater que les bénéfices vont bien au-delà de ce premier niveau de bénéfices économiques. Un second niveau de bénéfices touche à la performance générale de l’activité d’une organisation professionnelle. Ainsi, intégrer les pratiques de l’e-Formation, constitue le point de départ d’un processus développant progressivement des avantages organisationnels et stratégiques.

Potentiellement, une solution d’e-Formation de bonne qualité, plaçant l’apprenant au centre du processus d’ingénierie pédagogique, permet de proposer un apprentissage amélioré et donc plus efficace qu’un apprentissage selon une modalité traditionnelle. En 2010, un article du magazine l’Expansion, souligne que l’e-Learning peut désormais proposer de meilleures expériences de formations et d’apprentissages que celles proposées par la modalité traditionnelle. En d’autres termes, les personnes apprendraient plus, mieux et plus vite grâce aux e-Formations bien conçues et réalisées. Elles pourraient transférer plus efficacement et plus qualitativement leurs acquis dans leurs pratiques professionnelles courantes, ce qui en conséquence irait au bénéfice direct de la performance d’une organisation.

Enfin, un troisième niveau de bénéfice organisationnel peut être distingué à partir de l’exploitation dans une organisation des pratiques d’e-Formations et d’une certaine maturité dans l’exploitation des technologies de l’information, de la communication et de la collaboration. Ce troisième niveau caractérise ce que l’on appel aujourd’hui les organisations apprenantes. Le travail, la collaboration, la socialisation, la gestion des connaissances, l’apprentissage formel et informel s’y trouvent intimement liés et laissent émerger ce que le Théoricien Etienne Wenger (1998) définit et nomme « une communauté de pratiques ». Un groupe d’individus qui partagent régulièrement points de vue, idées, passions, travaux, dans le but commun d’une entreprise. Engagés dans de telles interactions, les membres d’une communauté de pratiques développent des compréhensions communes qui permettent de trouver des solutions, d’améliorer les processus de travail et les pratiques professionnelles. En résumé, une organisation qui apprend à mieux travailler, gérer et mener une activité professionnelle.

Références

  • Etude du cabinet FéFaur « L’offre professionnelle eLearning en France » (2010)

Anticipation des usages vs bénéfices pour l’apprenant

Il y a quelques semaines j’avais publié un article sur ce site consacré à l’effet diligence. Il s’agit de cet effet qui conduit, lors de l’apparition d’une nouvelle technologie, à transposer les formes et les usages antérieurs avant de pouvoir dépasser ce stade et développer de nouvelles fonctionnalités. Ainsi les premières voitures ressemblaient à des diligences, avant de se transformer complètement.

Parfois, les anticipations technologiques que nous faisons nous conduisent à imaginer des usages qui ne se réalisent pas, même quand la technologie devient disponible.

Je vous invite pour illustrer ce propos à consulter un post de Xavier Delaporte sur InternetActu relatant un papier de Keith Kleiner consacré au chat vidéo. Dans cet article, Keith Kleiner s’interroge sur la faible utilisation du chat vidéo, alors que lorsque l’on observe les films de science fiction, le mode de communication du futur est très souvent représenté sous cette forme. Pourquoi, maintenant que la technologie est disponible gratuitement, les utilisateurs ne la plébiscite pas ? Je vous renvoie à l’article pour connaître la réponse complète développée par l’auteur. Je vais plutôt ici essayer de transposer cette analyse au contexte du e-learning.

Keith Kleiner exclue les causes technologiques liées à la qualité de la vidéo. Il indique que cela n’empêche pas les internautes de visualiser des vidéos de mauvaise qualité sur Youtube prises à partir de téléphones portables. Dans le monde du e-learning, nous avons fait ce constat depuis très longtemps. Le média a peu d’importance.

Il voit plutôt les causes de cette faible utilisation dans le type d’interactions sociales entre êtres humains que veulent mettre en place deux interlocuteurs. La question centrale est donc la communication et non la technologie.

Dans la construction des dispositifs e-learning, nous sommes confrontés à ces questions : quand doit-on utiliser des technologies synchrones ? Asynchrones ? Que fait-on du mobile Learning ? Faut-il mettre la vidéo de l’animateur dans une classe virtuelle ? Et celles des apprenants ? Faut-il laisser le chat privé entre utilisateurs actif lors de classes virtuelles ?… Nous serons de plus en plus confrontés à des nouvelles questions de ce type et nous pouvons voir que nos anticipations basées sur les capacités de la technologie nous abusent parfois (souvent ?). De même la transposition des pratiques de la formation présentielle peut également nous induire en erreur. Prenons par exemple l’usage du chat privé dans les classes virtuelles. Beaucoup de formateurs que j’accompagne souhaitent ne pas autoriser les apprenants à utiliser le chat privé pendant le cours. Ils transposent la notion de bavardage pendant la classe. Or, dans le contexte est très différent de la salle de cours. Le bavardage ne fait pas de bruit. Le fait de ne pas bavarder ne garantit pas une écoute attentive (ce qui est vrai dans la salle de cours également ;-). L’apprenant peut réécouter le formateur sans lui demander de répéter grâce à l’enregistrement. Et surtout, les moments synchrones sont des moments d’échanges entre les participants qui développent l’appartenance à une communauté ce qui est à la fois essentiel dans une formation, et plus difficile à construire dans une formation à distance. Il faut donc ouvrir ces fonctions car elles sont bénéfiques pour l’apprenant.

Il s’agit donc pour les concepteurs de revenir en permanence à la notion de bénéfice pour l’apprenant. Il faut être à l’écoute, observer. J’ai assisté hier soir à une conférence d’Eliott Masie sur les usages de l’Ipad. Il indiquait qu’un des usages les plus répandus était l’utilisation comme un deuxième écran. On utilise l’Ipad en même temps que la télévision, ou en même temps qu’un ordinateur. J’ai souris car je me suis reconnu comme utilisateur. Cet usage n’est pas évident a priori. Ce que recherche l’utilisateur c’est la synchronicité et la complémentarité. Cela implique des contenus différents, qui se complètent entre les types de terminaux. Le rôle du concepteur est donc de plus en plus d’observer, d’analyser les usages, de concevoir des contenus adaptés à ces usages, mais aussi de promouvoir de nouveaux usages et de favoriser le partage des bonnes pratiques. C’est évidemment une aventure passionnante !

Médias sociaux, formation informelle et effet pervers ?

Les outils du web 2.0 ont créé de nouveaux usages et ont entraîné de profonds bouleversements dans les processus de formation et dans le rôle du formateur/enseignant…

E-learning : une histoire courte mais riche d’évolution

Nous sommes passés en une dizaine d’années de dispositifs centrés sur le formateur, des modules largement issus de la formation présentielle et simplement transposés à la FAD (Formation à Distance), à des dispositifs centrés sur l’apprenant, cette transformation étant rendue possible par la généralisation d’outils (ceux du Web 2.0 notamment) qui modifient en profondeur le mode de communication des utilisateurs.

Les outils du web 2.0 ont créé de nouveaux usages et ont entraîné de profonds bouleversements dans les processus de formation et dans le rôle du formateur/enseignant.

Nous en sommes aujourd’hui à l’ère du collaboratif, où l’on peut dire que les services de partage, de social learning et les pratiques collaboratives sont mis en valeur et proposés à l’apprenant et à l’enseignant/formateur. Chaque membre d’une communauté d’apprenants enrichit le contenu, partage ses pratiques et ses difficultés.

Bienvenue dans l’ère du collaboratif…

Avec l’utilisation des outils du Web 2.0, la connaissance se construit en permanence. La connaissance n’est plus la propriété de « celui qui sait » diffusée verticalement vers celui qui apprend. La connaissance devient collective, partagée à travers les réseaux vers des communautés d’utilisateurs.

La part allouée à la formation informelle est aujourd’hui de plus en plus importante dans les dispositifs blended, et l’accent est mis sur les communautés de pratiques, les communautés d’apprenants qui partagent, enrichissent et échangent le contenu de l’apprentissage.

Ainsi l’apprenant, pour peu qu’il sache chercher, utiliser et partager l’information, en tire un bénéfice pédagogique certain.

Nous savons par également que nous acquérons la majorité de nos savoir faire et savoir en situation de formation informelle

…et de la formation informelle.

Dans la formation informelle, les apprenants fixent eux mêmes leurs objectifs. Ils apprennent quand ils ont besoin d’apprendre, et voient l’efficacité de l’apprentissage lorsqu’ils savent faire quelque chose qu’ils ne savaient pas faire avant.

Il y a situation de formation informelle par exemple lorsque l’information vient suite à une demande de l’apprenant qui cherche de l’aide à travers son réseau, ou bien lorsque les personnes reçoivent une information utile à travers une conversation. La situation de formation informelle ne se distingue pas forcément de la situation de travail. Les intéressés n’ont pas forcément la conscience d’apprendre.

Cet apprentissage informel est géré par l’apprenant lui même qui le jugera efficace s’il résout ses problèmes ou augmente effectivement son savoir-faire.

Le contexte économique actuel, le besoin d’aller toujours plus vite, de gagner du temps, obligent à disposer du maximum d’informations pertinentes et actualisés afin d’agir vite et bien, pour procurer aux acteurs de l’entreprise tous les moyens nécessaires à l’action : c’est l’enjeu de la formation et de la capitalisation des connaissances.

De nouveaux outils à disposition

La panoplie des outils e-learning, qu’ils soient LMS, outils auteurs ou autres outils d’animation, répondent à la nécessité pour les entreprises de disposer d’une formation/information quasi en temps réel. L’information et la connaissance sont aujourd’hui les armes de la performance pour les entreprises.

Les médias sociaux sont donc de plus en plus largement utilisés dans la formation parce qu’ils répondent aux besoins de communication, d’échange et de partage des apprenants.

Mais prenons un peu de recul, demandons nous quelle est l’utilité réelle de tous ces outils mis à la disposition des apprenants ?

Les apprenants utilisent ces outils pour :

  • Trouver des réponses à leurs problèmes ou proposer des réponses.
  • Être au courant de ce qu’il se passe dans leur entreprise et leur métier, faire de la veille technologique.
  • Construire un réseau fiable de collègues, d’experts à l’intérieur et à l’extérieur de l’entreprise.
  • Communiquer, échanger,  collaborer avec des collègues.
  • Partager des ressources et de l’expérience.
  • Améliorer leur efficacité.

Le coeur du dispositif n’est plus le contenu déployé, mais l’apprenant et la communauté qui interagit,  collabore,  enrichit le contenu,  crée du lien.

Quid de l’accompagnement ?

La tentation peut alors être grande pour l’entreprise de déplacer la responsabilité de la formation sur l’apprenant. La mise à disposition d’outils, l’efficacité des réseaux sociaux, l’horizontalité des processus d’apprentissage ne doit pas faire oublier que l’efficacité pédagogique tient principalement dans la faculté qu’ont les apprenants à chercher, analyser, produire de l’information.

Sans accompagnement adéquat, le risque est donc de creuser l’écart existant entre ceux qui savent utiliser ces nouveaux outils, ceux qui savent chercher, analyser, produire de l’information, et ceux qui ne savent pas, qui ne sont ni prêts ni préparés à cela.

Ce qu’il faut, c’est certainement que tout le monde apprenne à apprendre, et surtout ceux qui sont le moins préparés, au niveau technologique ou culturel.

Le défi que doit relever le e-learning aujourd’hui reste celui de l’innovation pédagogique, la réelle prise en compte d’un accompagnement afin que les technologies à notre disposition servent les objectifs de toute formation : acquérir des savoirs, savoir faire et peut être savoir être…

Pour l’intégration de modules de sciences de l’éducation dans la formation des chefs de projet e-learning

Il existe en France de nombreuses formations à la gestion de projets e-learning. Toutes ces formations n’intègrent pas de modules sur les théories de l’apprentissage et les modèles pédagogiques. Petit état des lieux de la situation et de ses conséquences…

Depuis une dizaine d’années, l’offre de formation pour les futurs chefs de projet e-learning est en développement. Les parcours les plus complets se situent au niveau master et sont offerts par plusieurs universités françaises. Les modules proposés permettent, selon les dispositifs, de répondre à une grande variété de profils d’apprenants. Tel sera intéressé par l’acquisition de compétences sur les outils auteurs, un autre sur la gestion de projet ou l’ingénierie pédagogique, etc.

Le chef de projet e-learning, qui est fréquemment en charge de la conception du dispositif, doit donc posséder de nombreuses connaissances sur des champs très variés. Ce n’est pas la moindre des difficultés auxquelles est confronté le responsable d’un master. Le souhait des apprenants voulant réaliser leur master en un an pèse également au moment de définir la maquette du diplôme. Quel poids relatif faut-il donner à tel ou tel module ? Lesquels sont à proposer en option ? Quels sont ceux sur lesquels faire l’impasse ?

Ainsi, il apparait que la formation des chefs de projets e-learning n’intègre pas toujours des modules sur les théories de l’apprentissage et les modèles pédagogiques. Ceci me parait dommageable tant il est vital de ne pas oublier que le e-learning, c’est d’abord et avant tout de la formation, c’est-à-dire des activités d’enseignement, d’apprentissage, de support à l’apprentissage et d’évaluation. Ces activités ne peuvent être pensées, conçues et réalisées avec bonheur qu’à la condition d’avoir un minimum de repères théoriques.

Il serait donc nécessaire, a minima, de permettre aux chefs de projets e-learning d’être en mesure d’identifier les principales caractéristiques des différentes approches pédagogiques qui sont tirées des modèles pédagogiques, eux-mêmes issus des théories de l’apprentissage. Ces connaissances permettraient au chef de projet e-learning de mieux identifier les options pédagogiques sous-jacentes à l’expression de leurs besoins par les clients du e-learning. Que ce soit dans une démarche prescriptive, déclinaison des principes d’un modèle pédagogique dans un dispositif, ou descriptive, repérer à quel modèle théorique se rattache une pratique, savoir distinguer les intérêts et les inconvénients d’une démarche pédagogique transmissive, béhavioriste, constructiviste, socio-constructiviste, etc. constitue une compétence à développer par les chefs de projet e-learning.

Nous avons la chance, en France, d’avoir de très bons départements universitaires en sciences de l’éducation. Ceux-ci intègrent d’ailleurs de manière de plus en plus fréquente des cursus prenant en compte les impacts de la mise à distance de la formation.  Les ressources humaines et de contenu ne manquent donc pas. En conséquence, il appartient aux responsables des formations de chefs de projet e-learning de pouvoir les mobiliser et leur faire une place dans leurs cursus.

E-learning Rapid et Agile !

L’évolution des outils de production de contenus e- learning a conduit il y a quelques années à l’apparition de logiciels dits de Rapid e-learning. Ces logiciels dont la finalité est de produire rapidement des contenus sont destinés avant tout aux experts du sujet traité dans la formation.

Il leur permet d’être autonomes dans la réalisation de leur modules en ligne. Toutefois, après quelques années d’existence on a vu se développer des projets dans lesquels les experts du contenu sont accompagnés d’une équipe de réalisation, voire même de conception. Cette évolution pose de nombreuses questions. Nous allons ici nous attacher à la question de la gestion du projet dans cette configuration.

Qu’est-ce que le rapid e-learning exactement ?

Avant de rentrer dans le détail de la gestion d’un projet Rapid e-learning, il faut s’arrêter quelques instants sur sa définition. Un projet Rapid e-learning se défini t par rapport à un projet e-learning dit « classique ». Un projet classique est composé de plusieurs phases que sont :

– la conception générale qui définit les grandes lignes du contenu de formation (objectifs pédagogiques, plan détaillé, charte graphique,…),

– la conception détaillée qui se concrétise par la rédaction d’un story-board qui décrit précisément tous les éléments qui vont se trouver sur les écrans du module,

– la réalisation qui consiste à médiatiser et mettre en œuvre les interactions qui sont décrites dans le story-board,

– la mise en ligne des contenus réalisés.

Chaque phase fait l’objet d’une validation formelle afin de ne pas modifier les options retenues initialement dans les phases ultérieures.

Le Rapid e-learning consiste à confondre les phases de conception détaillée et de réalisation dans une même opération. Pour cela les outils de Rapid e-learning proposent par exemple de s’appuyer sur Powerpoint afin de faire la conception et la réalisation avec le même outil.

L’argument est le suivant : vous êtes un expert du sujet traité –  vous connaissez Powerpoint – on vous propose des fonctions multimédias qui s’ajoutent à Powerpoint et qui sont très simples d’utilisation – vous êtes autonome dans la réalisation de vos contenus e-learning.

C’est en cela que c’est « Rapid ». Le projet est simplifié, l’équipe est réduite à sa plus simple expression.

Quelles sont les grandes tâches d’un projet de ce type ?

Même si le projet se simplifie il reste composé des grandes tâches essentielles. La conception générale ne change pas par rapport à un projet classique. Il faut toujours définir les objectifs pédagogiques du module, définir les aspects ergonomiques, et structurer le contenu. Les compétences nécessaires pour cette tâche sont des compétences d’ingénierie pédagogique standard auxquelles peuvent venir s’ajouter des compétences graphiques et des compétences sur l’ergonomie et l’ingénierie pédagogique spécifique aux contenus de formation en ligne.

Il faut ensuite réaliser les écrans c’est-à-dire ce qui est affiché (textes, illustrations, vidéos, animations), ce qui est dit (voix-off) et les interactions proposées à l’apprenant. Dans cette phase les outils de Rapid e-learning proposent de travailler directement dans l’outil de réalisation pour gagner du temps. Les outils sont souvent composés de logiciel simples d’utilisation ou de fonctions ajoutées dans un logiciel connu (comme Powerpoint par exemple).

En termes de compétences, le concepteur réalisateur doit maitriser le logiciel de réalisation. Il doit également connaitre les règles de conception d’écrans efficaces du point de vue de l’apprentissage. Enfin il doit maitriser un minimum de techniques de traitement des médias utilisés dans les modules (images fixes, animées, vidéos, sons). Si ces différentes compétences sont tout à fait accessibles à l’expert du contenu, le niveau attendu en terme de qualité de conception et de réalisation est un niveau professionnel. Cela nécessite donc de sa part un investissement en temps et en formation suffisant pour atteindre une production ayant le niveau de qualité requis. Mon expérience de ces projets montre que le niveau de cet investissement est en général sous-estimé. Les postulats de départ qui consistent à considérer que l’expert, surtout s’il est formateur, est compétent en matière de conception d’écrans, de traitement des médias et même de maitrise de Powerpoint est souvent erroné.

Cela conduit bon nombre d’organisations à lancer des projets de « Rapid e-learning » associant des experts des contenus et des experts de la conception et réalisation de modules fait avec ces techniques. Souvent cette démarche est justifiée par un manque de disponibilités des experts pour mobiliser un temps assez long à la conception et à la réalisation de ressources pédagogiques de ce type. On y ajoute en général la capacité qu’offrent ces outils  pour maintenir les contenus de façon autonome. Mais alors, comment gérer ce projet en équipe tout en gardant l’aspect « Rapid » du Rapid e-learning.

Quels sont les inconvénients des méthodes de gestion de projet classique dans ce type de projets ?

On l’a vu précédemment dans un projet classique, on sépare la conception de la réalisation. La conception détaillée des écrans est matérialisée par un story-board qui fait l’objet d’une validation. Cette étape est importante car elle  garantit au réalisateur qu’il travaille sur une matière validée. Par exemple, les voix-off de l’écran ont été rédigées dans le story-board. Elles sont validées donc il est possible de procéder à leur enregistrement sans risque. Cette méthodologie est assez lourde mais elle permet de faire avancer le projet efficacement en termes de coûts et de délai.

Le problème lorsque l’on travaille avec des outils de Rapid e-learning, c’est que l’on travaille directement dans l’outil de réalisation. Ainsi la validation du contenu des écrans n’intervient que lorsque les écrans sont réalisés. Aussi, toute modification est assez coûteuse en ressources et en délai. Pour limiter ce phénomène on renforce la conception générale. On rédige notamment un plan détaillé très précis (aussi appelé synopsis). On y détaille le dé coupage en écrans, la nature des écrans et les activités pédagogiques qu’ils proposent. Mais cela ne résout pas le problème des détails comme les éléments affichés sur l’écran, la cinématique d’une animation, le texte d’une voix-off… Et c’est là que l’on peut passer beaucoup de temps à faire des retouches, et que l’on perd le bénéfice du « Rapid e-learning ». Il semble donc qu’il faille trouver une autre façon d’aborder le projet afin de maintenir l’aspect pluridisciplinaire de l’équipe qui garantit la qualité finale du produit, et la souplesse et la rapidité offertes par les outils du « Rapid e-learning ».

En quoi les nouvelles méthodes de gestion de projet peuvent-elles apporter un progrès dans ce contexte ?

Lorsque l’on étudie les caractéristiques des nouvelles méthodes de gestion de projets qu’évoquent Beatrice Lhuillier (dans son article sur ce site)  en regard des constats précédents on trouve des axes de progrès évidents.

Tout d’abord, ces méthodes respectent le phasage global du projet. On conservera dans notre cas une phase de conception générale, une phase de conception/réalisation et une phase de mise en ligne.

Mais là où le progrès potentiel est important est dans le pilotage de chaque phase et plus particulièrement de la phase de conception réalisation. L’idée directrice des méthodes agile est de concentrer des moyens importants durant une courte période associant tous les acteurs du projet. Cela est tout à fait adapté à des projets de type Rapid e-learning qui sont de projets de petite taille dont la finalité est de sortir un contenu de bonne qualité rapidement.

Pour être concret, il s’agit de mobiliser tous les acteurs du projet de façon importante durant une période définie à l’avance avec un objectif de réalisation précis. Chacun sait quel est son rôle et doit contribuer à la production envisagée dans le respect des délais. Par exemple, une entreprise doit réaliser un module pour former ses vendeurs sur un nouveau produit. On constitue une équipe de projet constituée d’un chef de projet, d’un formateur interne, d’un membre du marketing responsable du produit, d’un prestataire charge de la conception pédagogique, d’un prestataire charge de la réalisation (réalisation et traitement des médias, intégration, mise en place de l’interactivité). Une fois la conception générale validée, cette équipe dispose de 4 semaines pour réaliser le module. Chacun est habilité à prendre des décisions pour le compte de l’entité qu’il représente.

Si l’on veut faire une synthèse des avantages de ces méthodes dans le contexte du Rapid e-learning on trouvera :

– un avantage en termes de qualité car tous les acteurs spécialistes et complémentaires sont rassemblés et peuvent profiter des apports de chacun en temps réel. Il n’y a pas de déperdition dans la transmission des informations,

– un avantage en termes de délai car les arbitrages sont pris très vite au sein du groupe projet qui a toute autonomie pour cela,

– un avantage en termes d’organisation car si les acteurs internes à l’entreprise sont fortement mobilisés pendant la durée du projet, l’effort est concentré dans le temps et sa durée est garantie par le processus même.

Attention tout de même à bien respecter les pré-requis indispensables au succès de ces méthodes :

– l’autonomie du groupe projet notamment en matière de décisions,

– la disponibilité importante des membres du groupe durant la session,

– la compétence collective du groupe qui doit couvrir tous les savoirs et savoir-faire nécessaires au projet, ou à défaut la possibilité de disposer de ressources externes complémentaires,

– la taille du projet qui doit être compatible avec une durée de réalisation courte (quelques semaines seulement).

Conclusion

On voit que les nouvelles méthodes de gestion de projet peuvent compenser certaines faiblesses des méthodes traditionnelles dans le contexte de la production de ressources réalisée avec des outils de Rapid e-learning.

Elles introduisent néanmoins de nouvelles pratiques dans la conduite des projets qui vont nécessiter une adaptation progressive. C’est peut-être pour cela que les projets Rapid e-learning qui sont des projets peu complexes et de taille modeste peuvent être un excellent terrain d’expérimentation de ces nouvelles méthodes. Une fois celle-ci apprivoisées, elles pourront s’introduire plus facilement dans des projets plus complexes comme les Serious Games par exemple.

Effet diligence, expérience, innovation

Le salon e-learning expo vient de se dérouler à Paris. Il suivait de près un autre rendez-vous important du e-learning en France ilearningForum qui s’est tenu il y a quelques semaines. En échangeant avec les visiteurs de ce salon, une remarque revient souvent. Elle porte sur le manque d’innovation dans les offres proposées par les acteurs présents dans ces manifestations.

On peut bien entendu interroger les uns et les autres qui nous diront : « les prestataires ne sont pas assez innovants » ou « les clients ne sont pas mûrs pour accepter des solutions réellement innovantes ». Tout cela est sans doute en partie vrai, mais je vous propose ici de prendre un peu de recul pour analyser plus en détail cette situation.

L’effet diligence

Intéressons nous d’abord au processus qui conduit vers l’innovation et transposons le ensuite au cas du e-learning. Introduire une innovation dans un contexte social est toujours un phénomène complexe qui passe en général par ce que Jacques Perriault appelle l’effet diligence qu’il définit ainsi :

Une invention technique met un certain temps à s’acclimater pour devenir une innovation, au sens de Bertrand Gille, c’est-à-dire à être socialement acceptée. Pendant cette période d’acclimatation, des protocoles anciens sont appliqués aux techniques nouvelles. Les premiers wagons avaient la forme des diligences.

L’histoire des techniques nous fournit de nombreux exemples de ce phénomène. Dans le monde du e-learning nous constatons aussi cet effet. Les formateurs et concepteurs de formation en ligne ont tenté dans un premier temps de reproduire leurs pratiques en utilisant les techniques multimédia et le réseau. On a ainsi vu, des universités prestigieuses comme Berkeley ouvrir une chaîne sur YouTube pour diffuser ses cours filmés en salle. Les outils de rapid e-learning sont également beaucoup utilisés pour sonoriser des Powerpoint existants en y ajoutant un quiz de temps à autre. Il en est de même pour les LMS qui sont la version en ligne de modèles de distribution de formation proches d’organismes de formation traditionnels avec leur catalogue, leurs inscriptions, leurs convocations et leurs feuilles d’émargement. Les classes virtuelles n’échappent pas à la règle. On y retrouve tous les attributs qui sont nécessaires au formateur en salle ! Un outil pour projeter, un outil pour parler, et même un outil pour lever le doigt.

Tout cela est tout à fait normal. Toutefois, on constate que le progrès réel intervient seulement si l’on atteint le stade de la véritable innovation. Autrement dit, lorsque l’on dépasse le simple effet diligence. Cela est d’autant plus vrai que l’innovation technique représente une avancée qui s’accompagne souvent d’une dégradation de fonctionnalités antérieures. On se rappellera par exemple que l’arrivée du Web s’est traduite par la difficulté d’afficher des images ou de diffuser des sons dans un module e-learning  à cause des faibles débits des réseaux alors que le CD-ROM le permettait. La voiture électrique possède une autonomie réduite, la télévision 3D nécessite le port de lunettes, etc.
Dans le domaine du e-learning, nous observons que la mise en ligne des contenus a fortement réduit les échanges et la dimension sociale de la formation dans la plupart des dispositifs proposés ces dernières années. En effet si l’introduction des technologies d’Internet dans la formation est présentée comme un moyen de remettre l’apprenant au centre du dispositif de formation, elle conduit bien souvent à un renforcement du rôle du formateur ou de l’expert. On observe également un renforcement du rôle du contenu dans les projets. Une des motivations premières des entreprises dans l’utilisation du e-learning est la possibilité de diffuser un contenu homogène en tous points de son organisation. Il s’agit de diffuser la formation comme le ferait une chaine de télévision interne.

Aujourd’hui, l’enjeu est donc de dépasser ce stade pour obtenir un véritable progrès dans l’apprentissage.

Pour cela on va souvent combiner un recentrage sur les idées fondamentales de son métier (ce qui ne change pas) et apporter des idées ou des pratiques issues d’autres domaines parfois éloignés (ce qui va bouger).

L’expérience

Arrêtons nous un instant sur ce qui ne change pas. Le e-learning pose la question de ce qu’est la formation fondamentalement. La formation, comme tout métier qui n’a pas subi de profonds bouleversements depuis longtemps, se définit plus par ses pratiques que par ses objectifs ou ses principes. Aussi l’introduction de modalités techniques nouvelles qui bousculent ces pratiques met les professionnels de ce secteur dans des situations de trouble important. L’erreur qui est alors souvent commise est de proposer de nouveaux gestes professionnels définis essentiellement par les possibilités techniques et fonctionnelles des outils informatiques utilisés, alors qu’il faut se reposer la question des finalités de la formation pour savoir quels nouveaux gestes et nouveaux outils sont appropriés.

Mon expérience de l’accompagnement des formateurs dans le mise en œuvre de solutions blended learning montre qu’il y a un travail préalable important à mener sur les notions fondamentales du métier notamment dans le domaine de la conception. Cela nous conduit bien souvent à la réingénierie du dispositif de formation envisagé y compris dans ses composantes présentielles. Pour prendre un exemple simple : lorsque l’on travaille sur l’ergonomie des écrans pour réaliser une ressource en ligne, on met en œuvre des principes qui sont applicables aussi aux supports de cours utilisés dans les formations en salle. Le formateur va alors assez naturellement modifier ces supports même si cela ne faisait pas partie du périmètre initial du projet.
On ne peut donc innover que si l’on sait exactement ce qu’il faut conserver des principes fondamentaux de son métier pour ne pas se perdre. Cela permet de faire la part des choses et de ne pas se laisser abuser par l’innovation technologique.

L’innovation

Souvent la méthode la plus efficace pour sortir de l’effet diligence est de s’interroger sur le pourquoi des usages, des processus et des fonctions des outils aujourd’hui mis en oeuvre dans les dispositifs de formation. En reposant ces questions et en s’affranchissant des contraintes actuelles liées aux modalités présentielles on peut trouver des formes innovantes.
Nous pouvons trouver aisément des exemples pour illustrer ce propos.

La formation présentielle comporte de lourdes contingences logistiques. Ces contingences déterminent souvent la durée de la formation ainsi que sa disponibilité par rapport au besoin réel de l’apprenant. Si on s’affranchit de cette contrainte, on peut organiser des séances de formation de quelques minutes en autoformation ou en classe virtuelle. On peut travailler au plus près du besoin réel de l’apprenant. On peut modifier complètement la structure de la formation par rapport aux situations de mise en oeuvre des connaissances dans les situations de travail. On pourrait développer longuement ce sujet, ce que je ferai dans de prochains articles.

On cherche également à intégrer des usages issus d’autres secteurs d’activité utilisant les mêmes outils, ou les mêmes technologies. Nous voyons notamment apparaître comme innovation, l’usage des outils du web 2.0, les SeriousGames ou le mobile Learning. L’innovation peut donc résulter du croisement de deux principes d’utilisation d’une technologie permettant de créer un usage nouveau.
Cette idée est très intéressante mais il faut toutefois respecter quelques principes de base :

  • Rester dans ses objectifs. Le but de la formation est de former, c’est à dire favoriser l’apprentissage de savoirs, de savoirs-faire et de savoir-être permettant le développement de nouvelles compétences clairement identifiées. En cela l’objectif de la formation est singulier au regard des objectifs que poursuivent les autres utilisateurs du web 2.0, du jeu vidéo, etc.
  • Utiliser les expériences des acteurs « historiques ». J’ai assisté notamment à des conférences sur le SeriousGame où certaines questions étaient posées comme nouvelles alors que ce domaine croise des cultures établies : la formation, l’utilisation du jeu en formation initiale et en formation des adultes, le jeu vidéo,…Pour les acteurs de ces domaines d’activité les réponses à ces questions sont déjà tranchées. Il s’agit de ne pas « réinventer l’eau chaude » et de faire appel aux acteurs de ces secteurs pour gagner du temps et éviter les erreurs de base. Dans beaucoup de ces secteurs il n’y a pas d’histoire écrite, de capitalisation et partage de bonnes pratiques, ou même de formation « officielle » parce que ces secteurs sont trop jeunes ou mal organisés. Tout repose alors sur l’expérience de ses acteurs. Il faut en tenir compte.
  • Identifier la valeur ajoutée de l’innovation. C’est la clé du succès. On voit beaucoup de projets qui reposent sur des fonctions techniques nouvelles mais qui n’apportent pas beaucoup de plus value à l’utilisateur. La question est clairement posée aujourd’hui dans le mobile Learning par exemple. A quoi sert de diffuser un contenu sur un téléphone portable ? Quels types de contenus ? Pour quels usages ? J’ai récemment utilisé un outil de classe virtuelle sur mon téléphone. C’est une prouesse technologique. Mais les slides projetés étaient très petits. Je ne pouvais pas parler pour participer et je devais utiliser le chat qui masquait tout l’écran. Certaines fonctions m’étaient interdites. La classe durait 30 minutes ce qui est très long quand vous êtes dans la rue ! Il faut donc toujours raisonner en termes de bénéfices utilisateurs (apprenants, formateurs, tuteurs, commanditaires,…). Ces bénéfices ne reposent pas seulement sur la composante technologique de l’innovation.
  • Etre à l’écoute des innovations dans d’autres domaines. Aujourd’hui de nombreuses innovations techniques sont proposées : tablettes, reconnaissance gestuelle, avatar intelligent, réalité augmentée,…Toutes ces innovations arrivent à des coûts d’utilisation très bas, donc compatibles avec nos modèles économiques. Il n’y a pas que des innovations techniques. Les usages du réseau évoluent également de façon importante. Le succès fulgurant de Facebook mais également des réseaux professionnels en sont des exemples visibles. Il faut que notre domaine s’empare de ces innovations pour être plus efficace et répondre à la demande des utilisateurs (donneurs d’ordre, mais surtout apprenants)

L’innovation est donc avant tout une prise de risques. Cette prise de risque est nécessaire au progrès, notamment dans notre secteur. On peut limiter le risque en prenant des précautions dont certaines sont évoquées plus haut, mais cela ne garantit pas le succès. Les acteurs de la formation attendent cela du secteur du e-learning. Le développement de ce secteur passe par sa capacité à innover tout en restant dans ses objectifs initiaux de formation. Et nous sommes actuellement à un moment charnière de ce  processus : sortir de l’effet diligence…

Au secours ! Mon chef veut « faire du e-learning » !

Dans les mois à venir, nous allons vous conter l’histoire d’un individu lambda que nous appellerons Jean-Michel. Jean-Michel travaille dans une structure de formation (grande ou petite peu importe…). Il maitrise son métier mieux que personne. Et un jour, sans crier gare, son chef lui annonce qu’il est chargé de mettre en place le e-learning pour toute sa société… Vous vivrez ses questionnements, ses avancées, ses doutes. Sur cette base, nous vous commenterons la mise en place d’un dispositif, le tout avec humour !

Comment tout a commencé…

Cela fait quelques mois ou quelques années que vous êtes à votre poste (Formateur ? Responsable de Formation ? DRH ?)
Vous sortez de votre entretien annuel d’évaluation qui, jusqu’au dernier quart d’heure, se passait parfaitement bien. Vous avez atteint vos objectifs, discuté de vos difficultés au quotidien, vous avez même réussi à obtenir que BigBoss intervienne directement dans tel ou tel dossier…Et, pour la première fois peut être, mis en confiance par un climat serein et constructif, vous vous êtes ouvert à BigBoss, vous lui avez parlé de vos passions personnelles : le développement d’un site internet pour un ami, votre épouse qui « travaille dans le multimédia » (elle est infographiste) etc.

« Cet entretien annuel d’évaluation se passait parfaitement bien jusqu’au moment où… »

C’est à ce moment précis que, tel un renard à l’affût, BigBoss a commencé à vous parler de vos missions pour l’année à venir. Il vous annonce, d’un ton jovial que, justement, il vous affecte à une mission « superbe, ambitieuse, exactement dans vos cordes mon petit Jean-Mimi… ».
Après 10 minutes d’explication, l’entretien de 2 heures touche à sa fin. Vous n’avez pas su ni pu lui dire non. La messe est dite. Vous sortez de la salle de réunion, vous répondez à sa poignée de main franche et sèche par la vôtre devenue molle et moite. « Et ne vous inquiétez pas pour votre augmentation mon petit Jean-Mimi, vous avez toute ma confiance, j’en fais mon affaire… Continuez dans cette voie et tout ira bien…»

« Vous avez toute ma confiance… »

Et vous vous retrouvez dans le couloir, le dos courbé, les jambes flageolantes, le souffle court…
De quoi s’agit-il exactement ? Quelle mission peut, à ce point, vous angoisser à l’idée même de vous y atteler ? Vous, si sûr de vous d’habitude, voyons….
Pensez donc, cela fait des années que vous travaillez « dans la formation », vous maitrisez votre sujet : les apprenants c’est votre tasse de thé, l’ingénierie de formation et l’ingénierie pédagogique vous faites ça les mains dans les poches.

« Alors quoi ? Qu’est-ce qu’il se passe Jean-Mimi ?» vous demande Colette la Pipelette à la pause café, étonnée de vous voir soudain fragilisé…
Et là, entre deux gorgées d’un café corsé, les yeux hagards, la voix chevrotante, vous avouez, enfin : « Tu ne te rends pas compte, Colette…BigBoss vient de me demander de mettre en place le e-learning »
Un masque d’effroi tombe sur le visage de Colette. « Mon Dieu » dit-elle tout bas… avant d’ajouter « il fallait bien que ça arrive un jour de toute façon…. »

« BigBoss vient de me demander de mettre en place le e-learning… »

A partir de là, Colette la Pipelette est à la hauteur de sa réputation…L’information fait le tour de l’entreprise comme une trainée de poudre. On vient vous serrer la main, vous recevez des mails de soutien et même quelques petites tapes dans le dos à la pause déjeuner.

En une journée, vous êtes passé de « Monsieur Expert Formation » à « Monsieur E-Learning »…sauf que vous n’y connaissez rien au e-learning…

Après quelques jours d’abattement, vous décidez de ne pas vous laisser aller et de prendre le projet à bras le corps. Vous faites une razzia de livres sur Amazon, vous vous êtes inscrit à toutes les conférences sur le sujet, vous avez passé des heures sur votre ordinateur à affiner vos recherches sur Google, vous avez fait chauffer le moteur de recherche de Viadeo pour trouver des contacts intéressants dans le domaine.

Après plus de 2 mois, une pile de livres trônent sur votre bureau et votre table de chevet, vous avez acquis un vernis de connaissances sur le sujet mais…vous ne savez toujours pas par quel bout prendre le projet, par où commencer ? Les outils ? L’organisation ? La production ? Le tutorat ?
Alors que faire ?? Par quel bout prendre ce satané projet…??

« Par quel bout prendre ce satané projet ???? »

Suite au prochain épisode !
PS : toute ressemblance avec des personnages ou des événements réels ne serait que purement fortuite…ou pas !